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Le peintre Léonard Defrance dans sa première période liégeoise (1763-1773)

Un article rédigé par Pierre-Yves Kairis - RCF Liège, le 26 septembre 2022 - Modifié le 17 juillet 2023
D'art et d'histoire de Liège Le peintre Léonard Defrance dans sa première période liégeoise (1763-1773)

Si Léonard Defrance bénéficie d’une notoriété artistique, c’est essentiellement en raison de ses petites scènes de genre inspirées de modèles hollandais du XVIIe siècle. Toutefois, dans les dix premières années de sa carrière à Liège, il travaillait dans un style large, très différent. Les tableaux de cette période sont généralement méprisés par les historiens de l’art, dans la foulée du mépris que Léonard Defrance leur a voué à la fin de son existence. Pourtant, replacés dans le contexte artistique liégeois du temps, la trentaine de tableaux conservés de cette période entre 1763 et 1773 attestent une grande originalité dans le traitement de la lumière et méritent d’être reconsidérés.

Détail :  Portrait de Charles-Nicolas d’Oultremont en buste, Grand Curtius, Léonard DefranceDétail : Portrait de Charles-Nicolas d’Oultremont en buste, Grand Curtius, Léonard Defrance

Une période de purgatoire ? 


Après dix années passées en Italie et dans le Midi de la France, Léonard Defrance (1735-1805) regagne Liège en 1763 à la faveur de l’élection du prince-évêque Charles-Nicolas d’Oultremont. Dix ans plus tard, il se rendra en Hollande et il ne peindra dès lors plus que des petites scènes de genre à la manière hollandaise ; ce sont ces scènes de genre qui ont fait sa célébrité. Sa première période, entre 1763 et 1773, est parfois qualifiée d’années de purgatoire. Defrance l’a totalement reniée à la fin de son existence, comme ses Mémoires l’attestent, mais la réalité est plus nuancée. 

 

Léonard Defrance, Portrait de Charles-Nicolas d’Oultremont en buste, toile, 85 x 62 cm, Liège, Grand Curtius. Cliché P.-Y. Kairis.

 

Peintre de la cour


À peine revenu de Toulouse, Defrance est appelé à réaliser le portrait du nouveau prince-évêque ainsi que des répliques pour des membres de sa famille. Dans ses Mémoires, Defrance affirme que son portrait du prince a été fort critiqué et qu’il fut disgracié de la cour pour avoir été vrai ! Il est pourtant resté très actif pour la famille d’Oultremont, qui constituait la cour de Liège. Dans les années 1760, il a peint près de trente tableaux pour divers membres de cette famille. Plusieurs sont encore conservés au château de Warfusée. La disgrâce dont il prétend avoir fait l’objet est manifestement un travestissement rétrospectif de la réalité…

 

Léonard Defrance, Scène de marché, toile, 90 x 140 cm, Saint-Georges-sur-Meuse, château de Warfusée. © IRPA-KIK, Bruxelles.

 

Un reniement tardif


En fait, c’est toute sa première période liégeoise que Defrance a reniée à la fin de sa vie. Sa production des années 1760, religieuse notamment, devait alors lui apparaître bien fade tant elle était éloignée de ses conceptions ultérieures, empreintes de l’esprit rationaliste des Lumières et d’un anticléricalisme militant. Pourtant, la trentaine de toiles encore conservées de cette première période se démarquent de la production locale du temps par la maîtrise nouvelle de la lumière, ce qui explique le succès immédiat du peintre à son retour du Midi de la France. Le premier Defrance vaut décidément mieux que ce que le dernier en a dit !

 

Léonard Defrance, Joueurs de cartes, toile, 85,5 x 120,5 cm, Liège, Musée d’Ansembourg, dépôt du Musée des Beaux-Arts. © IRPA-KIK, Bruxelles.

 

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