C’est "un cas assez extraordinaire de résilience". Le peuple marquisien, qui a faillit disparaître il y a 100 ans, bénéficie aujourd'hui d'un formidable dynamisme culturel. Il ne cesse de fasciner Loïc Josse, ce breton passionné de mer et de voyages. Il vient de publier "Marquises - Si lointaine Terre des Hommes" (éd. Nevicata).
Oubliée, l’image des lagons turquoises, des vahinés et les cocotiers "qui ondulent dans l’alizé". Les îles Marquises que nous présente Loïc Josse forment un archipel de terres volcaniques, aux plages de sable noir. Où l'on ne voit que "des masses noires et vertes avec des pics basaltiques extraordinaires". C'est un pays de vallées profondes, où chacune était autrefois habitée par une famille. Les Marquisiens ne sont pas des Tahitiens, ils ne parlent pas la même langue. Mais tout cela - la langue, la culture - a failli disparaître avec sa population.
À la fin du XVIe siècle ils étaient environ 50 à 100.000 ; il y a 100 ans, on ne comptait plus que 2.000 Marquisiens, et on annonçait leur disparition. C’est "un cas assez extraordinaire de résilience", déclare Loïc Josse, même s’il n’aime pas ce mot. Aujourd’hui, la population marquisienne compte 9.000 personnes et 10.000 à Tahiti.
C’est le contact avec les Occidentaux qui a failli les faire disparaître. "Des marins qui arrivaient avec la grippe ça suffisait à tuer des dizaines, de centaines de Marquisiens." Maladies vénériennes, épidémies, mais aussi consommation d’opium. Et aussi "le désespoir", ajoute Loïc Josse. "Quand un peuple disparaît, quand toutes ces traditions, cette culture est effacée, condamnée, ce peuple sombre dans le désespoir." En témoignent, de nombreux cas de suicides collectifs.
Ce qui a sauvé le peuple marquisien, c’est notamment le Docteur Louis Rollin. Dans les années 1920, cet administrateur et médecin a œuvré pour une plus grande protection sanitaire. Il a notamment créé une école de jeunes filles pour leur donner des notions d'hygiène. L’Église aussi est venue au secours des Marquisiens. Elle qui, dans un premier temps, avait contribué à détruire sa culture – en interdisant les danses, le monoï, les tatouages, etc.
Un évêque a profondément marqué les Marquisiens : Mgr Hervé Le Cléac'h (1915-2012) - grand-oncle du navigateur Armel Le Cléac'h. Il était breton et ce n’est pas un hasard, selon Loïc Josse : "Je pense qu’il avait dans son enfance eu l’occasion de voir ce que voulait dire l’abandon forcé d’une langue et d’une culture." Nommé évêque de Taiohae en 1973, il s’est passionné pour ce peuple et sa culture. Lui qui disait ses messes en marquisien a traduit la Bible dans cette même langue. Il a apporté tout son soutien à l'association Motu Haka, à l’origine du grand renouveau culturel marquisien. C'est elle qui a lancé en 1986 le célèbre festival des arts des îles Marquises. Si bien que la culture marquisienne bénéficie aujourd'hui d’un dynamisme "assez extraordinaire".
Chaque semaine, Thierry Lyonnet donne la parole à un acteur de l'actualité culturelle. Écrivains, metteurs en scènes, peintres, etc., parlent de leur travail et de leurs œuvres.
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