Lorsqu’on pense aux princes-évêques collectionneurs au XVIe siècle, c’est le nom d’Érard de La Marck, grand prince de la Renaissance, qui vient immédiatement à l’esprit. Celui dont le règne fut souvent qualifié de réparateur fut un grand collectionneur et mécène. Sur la foi des inventaires et des rares pièces conservées, on estime qu’il possédait au moins deux cent cinquante tapisseries. Les informations sont plus rares pour les princes postérieurs. C’est Anne-Sophie Laruelle, chargée de recherche du FRS-FNRS et spécialiste des tapisseries de la Renaissance, qui nous en parle.
Au cours de son règne (1505-1538), Érard de La Marck fit rénover plusieurs bâtiments princiers, à commencer par le palais de Liège et le château de Huy. Il les orna de maintes tentures, soit des suites de tapisseries sur un même thème. Aux préoccupations artistiques se mêlent des considérations politiques. En 1517-1518, Érard rompt avec la France de François Ier pour se tourner vers Charles Quint, qui lui a promis la pourpre cardinalice. Jusqu’alors, il commandait généralement ses tapisseries à Paris (comme celles sur le thème de la Vierge ou de Saint Lambert offertes à la cathédrale de Liège en 1512). Après 1518, il ne les commanda plus qu’à des ateliers des Pays-Bas, essentiellement de Bruxelles.
Les thèmes des tapisseries que possédait Érard ne sont connus que par les inventaires. On trouvait essentiellement des verdures, souvent avec des scènes de chasse, comme celles qui ornaient le château de Huy. On ne connaît qu’un seul sujet antique, avec une tapisserie sur le thème d’Hercule – information intéressante, vu qu’on y retrouve le thème du seul tableau connu de la collection de peintures d’Érard. Mais ce sont surtout les sujets allégoriques qui semblent dominer. On songe aux tentures avec les Triomphes de Pétrarque, à celles sur les Honneurs d’après Pierre Coeck d’Alost ou à la suite de douze tapisseries sur le thème des Mois qui ornaient la salle à manger du château de Huy. Les thèmes religieux sont rares (Samuel, Salomon, Sainte Véronique), à telle enseigne qu’on se demande s’ils n’ont pas fait l’objet d’inventaires spécifiques et non repérés à ce jour.
Une dizaine à peine des tapisseries ayant appartenu à Érard de La Marck sont aujourd’hui authentifiées. Elles sont répandues à travers le monde : Glasgow, Lorette, Boston, New York… Certaines pourraient avoir été réalisées d’après des cartons de Lambert Lombard, le grand peintre liégeois de la Renaissance et peintre en titre du prince, comme ce Couronnement de la Vierge que l’évêque de Liège a offert à son ami le cardinal Alexandre Farnèse lorsqu’il accéda au trône de saint Pierre sous le nom de Paul III.
Beaucoup plus rares sont les informations recueillies sur les tapisseries commandées par ses successeurs, princes incontestablement moins opulents.
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