Au Loup ! Une bd intelligente pour sortir des affrontements stériles et essayer de préparer le retour (inéluctable du loup). Un album, aux brebis irrésistibles, signé Troubs et publié par Rackham, une maison de bandes dessinées alternatives, installée tout près des brebis et du canidé aux dents longues.
C’est une BD qui ne paye pas de mine. On la prendrait presque pour un album pour enfants, avec ses personnages à têtes d’animaux. Mais ne nous y trompons pas, Au loup ! est un album très sérieux.
Le loup est de retour en France depuis 1992. A la différence de l'ours, il n'y a pas eu de réintroduction. Le loup est arrivé tout seul, comme un grand, par les Alpes depuis l’Italie.
Dans cet album signé Troubs, nous sommes en 2015- 2017 sur le plateau de Millevaches au cœur du Limousin et le loup arrive. On commence à l’observer, on sait qu’il sera bientôt là. On découvre les premières brebis tuées. Les spécialistes du ministère mettent toujours du temps à l’admettre. Au début, ils disent que ce sont des chiens (forcément c’est moins cher à indemniser une brebis tuée par un chien...) mais tout le monde le comprend. Le loup se rapproche, il arrive, c’est inéluctable. Alors comment s’y préparer ?
On voit des éleveurs qui rencontrent des spécialistes, qui vont voir ce qui se fait ailleurs, qui se forment, qui s'équipent aussi mais surtout qui essaient de comprendre les loups et quelle est leur relation au troupeau. En fait, on découvre qu'il n 'y a pas de hasard, il faut connaître son loup. Et pour cela, il faut changer complètement sa façon de concevoir l'élevage de moutons et retourner à des pratiques plus raisonnées du pastoralisme avec ce triptyque : chien, humain et clôture électrique. Face au loup, les chiens Patou sont vraiment des éléments clés dans le maintien de l’élevage en montagne. Mais il faut aussi revenir à des troupeaux plus petits, gardés aussi par des humains et qui rentrent plus souvent dans des bergeries qui sont plus sécurisées. Tout cela a un coût, mais dans cet album, ceux qui veulent croire au possible maintien du loup comme du pastoralisme sont aidés et ont l’air plutôt satisfaits.
C'est beaucoup plus compliqué, ça demande de repenser ses pratiques d'élevage mais ça pourrait être profitable à l'ensemble de la biodiversité. Le retour du loup pourrait réguler des populations qui deviennent pléthoriques comme les chevreuil ou les sangliers. Et pour cela, il faut former, accompagner et soutenir les éleveurs.
L’album se termine par la publication du plan Loup (2024-2029) en février 2024. Un nouveau plan qui passe sous silence les mesures de prévention pour être clairement dans la ligne anti-loup. Les indemnisations en cas de brebis tués augmentent et on facilite les tirs de loups… Aucun encouragement pour ceux qui tentent de tenir les deux bouts de l’élevage et de la cohabitation.
L’auteur de cette BD a voulu dédramatiser un sujet assez lourd. On rit beaucoup et particulièrement des échanges entre les brebis (qui parlent forcément) et les douglas (qui parlent eux aussi et qui sont l’exemple type de monoculture désastreuse pour la biodiversité). On rit aussi devant ces éleveurs qui se retrouvent à quatre pattes dans l’herbe pour tenter de comprendre la réaction du troupeau … Et oui quand on est au milieu d’une centaine de brebis, on ne voit rien et c’est très rapidement que la panique peut se diffuser.
Au loup ! Chronique d'un retour de Troubs est publié chez Rackham, une maison d’édition installée au cœur du plateau de Millevaches. Une BD qui fait partie de la sélection Eco Fauve au Festival Internationale de Bandes dessinées d'Angoulême, une sélection qui met en avant des albums abordant des questions écologiques.
Une sélection de bandes dessinées proposée par Stéphanie Gallet.
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