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Chroniques du monde d'après (2/2)

RCF,  - Modifié le 8 juillet 2021

On est nombreux à vouloir un monde d'après l'épidémie plus écologique. Les chroniqueurs de Commune Planète le rappellent : l'écologie n'est pas que pour les doux rêveurs et les bobos !

Image par Larisa Koshkina de Pixabay Image par Larisa Koshkina de Pixabay

À quoi ressemblera le monde d'après la crise du coronavirus ? Enregistré en confinement, ce numéro de COMMUNE PLANÈTE, votre magazine de l'écologie, donne la parole aux chroniqueurs habituels de l'émission : Éric de KermelLudovic BuAnne Moreau et Sœur Anne, moniale cistercienne, ont accepté de nous aider à penser le monde d'après l'épidémie de coronavirus.
 

DIRE QUE TOUT DOIT CHANGER, UN LUXE POUR NANTIS ?

Le confinement et l'ampleur de l'épidémie marquent si profondément les esprits que beaucoup espèrent un monde d'après qui serait radicalement différent, et forcément, plus sain. Est-ce une bonne idée de vouloir tout changer, tout de suite ? Pour Éric de Kermel, directeur de la rédaction de Terre Sauvage, "la réponse [aux défis environnementaux et climatiques] doit s'élaborer et se construire sur le temps long".

Le chroniqueur nous rappelle combien la crise accentue les inégalités. Chez tous ceux que l'épidémie fragilisent, "le souhait profond est d'abord que ça redevienne comme avant et qu'ensuite éventuellement on se pose d'autres questions". Si l'on veut intégrer à ce changement "ceux qui sont plus vulnérables, plus fragiles" et aussi ceux "qui ont des activités polluantes ou qui impactent la biodiversité", il faut donc considérer le temps long. 

"Envisager de façon radicale le moment dans lequel on est, en se disant que tout doit changer, constate Éric de Kermel, est possible quand on a soi-même des ressources matérielles, psychiques, intellectuelles, spirituelles pour nous aider à envisager ces changements". Et à trop penser le monde d'après "de façon idéale" sans réfléchir à la manière dont on va accompagner le changement dans l'ensemble de la société, on risque de "passer à côté de quelque chose, en clivant encore plus comme lors de la crise des Gilets jaunes, en faisant de l'écologie un truc pour les bobos".
 

Un outil pour réfléchir concrètement à l'après

Alors que faire ? Pour Éric de Kermel, c'est d'abord au niveau individuel que les choses peuvent se jouer, car "chacun aura peut-être envie de faire des choix pour changer la donne". Auteur de l'article "Imaginer les gestes-barrières contre le retour à la production d’avant-crise" [Article AOC du 30/03/2020, soumis à identification] le philosophe et sociologue Bruno Latour, une des grandes voix de l’écologie en France, a publié, en complément à cet article, un outil pour nous inciter à réfléchir aux "activités que nous souhaiterions voir remises ou pas en marche après la crise".

Pour Éric de Kermel, cet outil peut nous aider à ne pas passer à côté de "cette occasion extraordinaire qui nous est donnée de réinterroger un certain nombre de nos modes de fonctionnement". Mais il nous met en garde : "Il ne faut pas tout changer d'un coup. Il y a dans nos vies de belles choses à remarquer aussi et ensuite, se mettre en route, en commençant par de petites résolutions, l'une entraînant l'autre, pour entrer dans une démarche vertueuse et positive."
 

Passer d'un monde à l'autre

"Une crise, c'est à la fois un danger et une opportunité." Chroniqueur dans Commune Planète, Ludovic Bu, consultant, spécialiste en mobilités durables et en management innovant, livre sa vision de ce que la crise actuelle peut changer. Selon lui, depuis quelques semaines, "on est vraiment sur le débat de savoir si on est capable d'élargir le spectre de l'économie qui a du sens et donc de l'économie du XXIe siècle ou si on va continuer à aider l'industrie et l'économie du XXe siècle à encore perdurer".

"Ce qui est en train de se passer, dit-il, c'est une confrontation entre le vieux monde avec ses avantages acquis, qui dit 'aidez-nous à survivre, il y a des millions d'emplois en jeu' - ce qui est vrai - et le nouveau monde, celui qui veut tenir compte de l'enjeu social et environnemental, etc., qui essaie de se battre pour sortir des limbes ou en tout cas être plus visible et reconnu"."

Selon le consultant, la clé de l'issue du combat entre ces deux mondes, c'est la décision publique : "C'est tout à fait envisageable de lier l'aide aux entreprises à la volonté politique de changer les modèles. C'est ce qui est en train de se dessiner au Danemark par exemple". Cette action publique pourrait d'articuler avec les évolutions individuelles : "Je crois que fondamentalement, les gens sont prêts à ralentir, à ne plus être dans la course permanente" déclare Ludovic Bu. "Est-ce qu'on est obligé d'aller à 10 kilomètres pour faire ses courses ? Dans les zones urbaines, la questions des distances qu'on va parcourir est apparue de manière très forte pendant ce temps de confinement." La grande question est de savoir si ces nouvelles habitudes vont s'inscrire dans le temps : "Un changement d'habitudes, ça s'opère rarement en moins de six mois..."

 


Retrouvez aussi dans cette émission  

- La chronique "Demain je m'y mets" d'Anne Moreau
- La chronique "Contemplation" de Sœur Anne, de l'abbaye Sainte-Marie de Boulaur

 

 

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