"Ma compétition est entièrement tendue vers les médailles", racontait il y a quelques jours une sportive de haut niveau, réalisant que le tout de sa vie ne pouvait trouver sens et goût dans cette pression. Mais ce n’est pas de sport dont il s’agit seulement, mais bien de l’ensemble de notre vie, où nous sommes bien souvent en compétition et, secrètement ou pas, espérant la gloire des victorieux. Est-ce de cela dont parle Jésus dans cette longue prière que nous écoutons à la liturgie eucharistique durant ces jours ? Et spécialement ce dimanche (Jean 17, 1b-11a) où il est beaucoup question de "gloire" ?
Ici pourtant, il n’est pas question de sommet et moins encore de ces gloires plus éphémères de ceux qui sont dans la lumière des feux médiatiques un bref instant, puis disparaissent - créations de notre monde toujours avide de mise en scène. Jésus, lui, est au pied du mont des Oliviers dans un jardin où il a l’habitude de retrouver ses proches. Ce sont ses derniers instants de liberté, Judas va arriver avec les gardes pour l’arrêter. Il sait ce qui va se passer. Aussi se met-il à l’écart avec Pierre, Jacques et Jean, pour prier avant cette terrible épreuve. Là, en ce moment glaçant, Jean fait dire à Jésus : "Père l’heure est venue ! Glorifie ton fils afin que ton fils te glorifie." La gloire donc mais laquelle ?
Dans la Bible, la gloire est thème très présent. Dans le premier Testament la kavod, est ce qui pèse lourd. Alors oui la richesse peut peser lourd bien sûr, mais toute la sagesse biblique insiste qu’elle est si éphémère, comme pour l’ami Job qui perd tout en une fraction de vie. "Jetteras-tu les yeux sur elles ? ... Déjà elles ne sont plus" rappelle de son côté le livre des Proverbes (23. 5). La gloire de Dieu c’est le poids de sa création offerte à l’humain afin qu’il puisse y vivre, inventer, aimer, penser, mais aussi garder et sauvegarder cette création laissée à son soin.
La gloire, c’est le poids de son alliance indéfectible. Elle ne concourt pour aucune compétition et n’enlève rien à quiconque, au contraire, elle affirme qu’elle nous prend tous. Le Fils est élevé, oui, mais non sur un podium mais sur une croix après un procès inique. Une croix, instrument ultime de torture de ceux qui sont reniés de tous. La hauteur de l’abaissement, voilà la gloire du Fils, la gloire à l’envers et donc à l’endroit, son partage sans mesure en notre faveur.
C’est pour nous qu’il prie, nous aux prises avec ce temps angoissant, incertain et secoué des spasmes de la barbarie. Pour nous qui voudrions croire complètement et de toute notre âme, notre intelligence et notre cœur, mais qui vacillons devant les ténèbres des vies brisées. C’est à nous, qui croyons sans voir, que cette promesse est faite : tout ce qui nous lie au Dieu vrai dans le soin du "plus bas" est vie éternelle.
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