LE POINT DE VUE DE PIERRE DURIEUX - "Heureux ceux qui croient sans avoir vu", une béatitude de plus en plus difficile à appliquer avec le développement de l'IA. Comment continuer à croire quand chaque image peut être trompeuse ? C'est la question que se pose Pierre Durieux.
Les nouveaux visuels fleurissent sur les réseaux sociaux : des images de monstres marins, de statues de bois improbables ou de sculptures dans le sable, et même des visages du Christ qui se distinguent au travers d’un paysage. Tout cela est assez beau, fascinant même… Mais faux !
Ces images créées par l’intelligence artificielle révèlent quelque chose de l’inconscient humain. Car il suffit désormais de dire pour faire acte de création : « fais-moi un visuel d’un garçon de 10 ans sur un vélo composé de tomates et de citrouilles » et quelques secondes après, l'IA vous fournit ce que même votre imaginaire ne parvenait pas à concevoir clairement.
Après la béatitude « heureux ceux qui croient sans avoir vu » est venu la maxime inverse : « heureux ceux qui voient sans avoir cru » ! En effet, ces photos et mêmes ces vidéos sont trompeuses. Et plus le temps passe, plus nous allons avoir du mal à distinguer le vrai du faux. Nous allons devenir collectivement sceptiques, affligés de ce torrent d’images dont plus personne ne saura plus dire si elle est une copie du réel ou une fiction de la machine. Mon mur Facebook a vu fleurir ainsi des colosses égyptiens grands comme trois humains, des serpents gigantesques à vous réveiller en pleine nuit et des récits improbables sur les extraterrestres servis par des visuels complètement fous.
Ces bizarreries que la nature humaine demande à la machine nous font errer dans l’incertain. Car si tout est sujet désormais à la suspicion, sur quoi fonderais-je ma certitude ?
Il y a dans l’Evangile du bon grain et de l’ivraie, l’idée que plus le temps passe, et plus l’ivraie devient prégnante, visible, nuisible, mais le bon grain, lui aussi grandi, au beau milieu de ce champs, et l’on peine un peu à s’y retrouver…
Il y a une autre raison que j’ai trouvée chez Blaise Pascal : il explique que plus Dieu s’est révélé au cours de l’histoire, plus l’acte de foi est devenu exigeant :
Ah, mon Dieu, avoir foi en Dieu créateur, c’était somme toute assez facile en regardant la création. Même Voltaire reconnaît que l’horloge suppose un horloger.
Avoir foi en Jésus-Christ, c’est plus dur en quelque sorte, parce que, en s’incarnant, Dieu s’est dépossédé de son infinité : notre acte de foi suppose désormais de deviner sous les traits de l’humanité de Jésus la divinité du Christ. Ses miracles, sa sagesse, sa miséricorde nous y aident, mais le saut de la foi est plus grand !
Avoir foi en l’Eucharistie, là, ça devient franchement chaud : que Dieu soit tout entier contenu dans ce petit bout de pain, cuisiné d’une main d’homme, c’est totalement inouï.
Reste que ces images fausses qui nous envahissent sur nos écrans vont nous faire douter de tout. Du monde visible, tout du moins, mais c’est peut-être une chance : une invitation à fermer les yeux, à entrer dans un peu plus d’intériorité, à éteindre les images et à laisser résonner la Parole.
Car oui, l’image nous emprisonne, mais la Parole nous libère !
Éteignez l’IA, allumez l’Esprit Saint !
Bonne journée chers amis !
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