À l'occasion du Salon de l'agriculture, Stacy Algrain l'écologiste, la militante, se mue en amoureuse du monde agricole et lui dit merci, "ce merci qu’on ose jamais trop dire, comme un "je t’aime" à son père. Mais qui résonne en nous comme l’évidence de la vie. Je veux vous le dire pour tous ceux qui ne l’ont pas fait, agriculteurs et agricultrices, paysans et paysannes, nous vous aimons. Si nos mots sont forts et nos revendications radicales, c’est avec vous que nous voulons faire et jamais contre."
Mon constat est clair, aujourd'hui, on n’écrit plus de lettres d’amour. Des tribunes, des articles, des posts explicatifs - plus ou moins explicatifs d’ailleurs - beaucoup ! J’en vois à la pelle. Tout le monde veut apporter son grain de sel, montrer qu’il a compris, prouver qu’il est utile. Les médias et les réseaux sociaux seraient un peu les nouveaux tableaux de classe. Et chacun d’entre nous s’improviserait tour à tour maître ou maîtresse d’école. Alors, oui, mais ton raisonnement est incomplet ; quel ramassis de conneries ; as-tu seulement lu le dernier rapport de la cour des comptes de Narnia ? La craie grince sur l’ardoise. On compte les points. Tout le monde aurait raison ou tort, selon la réalité à laquelle on souhaiterait adhérer. Oui, la vérité, ce nouveau club de gym en vogue. Mais si ! Vous savez, celui sur l’avenue du conflit !
Pourtant, vous et moi savons qu’il en est un avec lequel, on ne négocie pas : le cœur. Et ce cœur, enfermé dans sa cage dorée, palpite. Je croirais entendre un rouge-gorge virevolter. L’objet de mes désirs se rapproche, et voilà que le passereau s’est mué en un fantastique colibri. 60 battements d’ailes par seconde. Ce petit être fragile la cherche lui aussi… Que cherche-t-il ? La dernière lettre d’amour. Celle aux abonnés absents de nos réseaux…
Et voici que je prends la plume. Là, en plein centre du Salon de l’agriculture, où des foules se présentent pour entrapercevoir la cloche de Martine ou pour découvrir les merveilleux cépages de notre pays, je pense à elle, à lui, à eux. Nos paysans, nos agriculteurs. À vrai dire, depuis que la fille du Sud que je suis habite la capitale, je ne les vois que trop peu. Et je dois dire qu’ils manquent à ma vie, comme le soleil à Paris. Je milite, je m’agite, je cogite aussi, beaucoup. Sur ce que l’avenir pourra offrir de promesses à des générations ascendant changement climatique. Sur les plateaux, dans la rue et ici même, nous confrontons les puissants. C’est utile, nécessaire même.
Pourtant, quand je vois ces visages autour de moi, ces mains usées me rappelant celle de mon père et de ma mère, je n’ai pas envie d’hurler. Plus même l’envie de dénoncer, si ce n’est ce que ce monde a pu faire à des êtres de chair et de sang si précieux. Précieux par leur savoir et leur connaissance de la terre. Précieux par leurs regards fatigués et leurs visages d’une France qui résiste. Précieux par leur courage et leur force de corps et d’esprit. Précieux le matin, le midi et le soir, quand lorsqu’une assiette se présente, je sais à qui dire merci. Ce merci si rare et si sincère à la fois. Celui qu’on ose jamais trop dire, comme un "je t’aime" à son père. Mais qui résonne en nous comme l’évidence de la vie.
Je veux vous le dire pour tous ceux qui ne l’ont pas fait, agriculteurs et agricultrices, paysans et paysannes, nous vous aimons. Si nos mots sont forts et nos revendications radicales, c’est avec vous que nous voulons faire et jamais contre. Et si je n’avais plus qu’une seule chose à vous confier, ce serait : plutôt que les armes, je vous invite à prendre le papier et la plume pour écrire une histoire à deux, à trois, à mille voix.
Jeunes de la "génération climat", Féris Barkat, 20 ans et Stacy Algrain, 23 ans livrent en alternance, chaque semaine, leur regard sur l'écologie et leurs clés pour changer le monde.
Jeunes de la "génération climat", Alexandre Poidatz et Stacy Algrain livrent en alternance, chaque semaine, leur regard sur l'écologie et leurs clés pour changer le monde.
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