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Hildegarde de Bingen : une sainte écolo ?

Un article rédigé par Amélie Gazeau - RCF, le 15 septembre 2022 - Modifié le 5 mars 2024

. Naturopathe, musicienne, mystique et fondatrice de monastères, cette sainte allemande née au XIème siècle était jusqu'à aujourd’hui peu connue. Depuis quelques années, ses écrits visionnaires et son rapport à la nature séduisent au-delà des bancs de l'Eglise. Hildegarde de Bingen, une sainte "new age" ?

Sainte Hildegarde de Bingen / Abbaye de MarderetSainte Hildegarde de Bingen / Abbaye de Marderet

Hildegarde de Bingen : une figure mystique et politique du Moyen-Âge

En mai 2022, l’Eglise a fêté les 10 ans de la canonisation de la sainte allemande. Pour la troisième année seulement vous avez pu retrouver Hildegarde de Bingen dans le calendrier  des saints catholiques du jour.  Une "nouvelle" sainte qui pourtant a oeuvré à faire connaître le Christ au XIIème siècle. 


À 8 ans, la petite Hildegarde rentre au couvent. Elle prend l’habit et fait ses vœux perpétuels à 15 ans au monastère bénédictin de Disibodenberg sur le Rhin à quelques kilomètres du domicile familial. Dès son plus jeune âge, Hildegarde a des visions. À 42 ans, Dieu lui ordonne dans l’une d’elle d’écrire ce qu’elle "reçoit". Elle entame un travail titanesque d’écriture de l’histoire sainte qui fait d’elle l’une des plus grandes mystiques de son temps. Ses écrits auraient inspiré La Divine Comédie de Dante. 


À 38 ans seulement, Hildegarde est élue abbesse de son monastère par ses sœurs. Elle fondera un nouveau monastère quelques années plus tard à Eibingen, où son corps repose. Elle eut une influence considérable dans la vie politique et religieuse de l’époque. Hildegarde était respectée pour ses conseils avisées à une époque où les femmes étaient peu écoutées. Son assurance et son audace lui permettent de conseiller les grands de ce monde : les papes Eugène III, Anastase IV, Adrien IV et Alexandre III mais aussi les empereurs Conrad III et Frédéric Ier. Elle n’hésite pas à les reprendre ou parfois même les menacer. "Prends garde que le Souverain Roi ne te renverse à terre par suite de l’aveuglement de tes yeux qui ne voient pas droitement comment tu tiens dans ta main le sceptre de ton règne ! " lance-t-elle, sans détours à l’empereur, Frédéric Ier.

Respectée par ses pairs, Hildegarde de Bingen est un puit de culture et de science. Une religieuse passionnée par la création et ses créatures. Elle compose notamment 77 pièces liturgiques musicales inspirées de ses visions et réalise de nombreuses peintures et enluminures. Une créativité artistique et une réflexion scientifique foisonnantes qui resteront longtemps dans l’ombre avant de refaire surface, des siècles plus tard, en même temps qu’une prise de conscience écologique globale.

Saint Hildegarde, en avance de 1000 ans sur son temps

Vous avez peut-être entendu parler de la marque de tisane « Hildegarde » ou des formations en naturopathie proposées par l’institut « Hildegarde de Bingen » ? Depuis les années 80 et l’essor du New Age, un courant spirituel occidental basé sur le bien-être, les écrits de la sainte allemande refont surface après un millénaire d’anonymat. La raison ? Sainte Hildegarde serait la première naturopathe européenne. Fascinée par les plantes, elle décrypte la flore lors de ses balades autour du couvent et acquière un précieux savoir. Elle détaille ses observations dans un ouvrage "Physica" ou Livre des Subtilités des créatures divines qui est aujourd’hui une référence dans le monde de la médecine naturelle. Regroupée en 9 livres et composée de 230 chapitres, l’ouvrage recense prés de 300 végétaux, 230 plantes et 64 arbres. Hildegarde de Bingen que certains appellent la « sainte guérisseuse » y livre les bienfaits de ses plantes sur le corps humain. Sa plante de prédilection ? L’épeautre. Pour la sainte allemande c’est la meilleure céréale qui agit "comme un baume de l’intérieur". 


Au-delà de la mouvance New Age, c’est bien l’Eglise qui a fait de cette sainte méconnue une référence en termes d’écologie, notamment depuis la sortie de l’encyclique « Laudato si » du pape François en 2015. Déjà en 2010, le pape Benoît XVI vanter les mérites de la sainte écolo, qu’il qualifie de "grande prophétesse qui nous parle avec une grande actualité aujourd’hui aussi, à travers sa capacité courageuse à discerner les signes des temps, son amour pour la création, sa médecine, sa poésie, sa musique, qui est aujourd’hui reconstruite, son amour pour le Christ et pour son Eglise". L’Eglise catholique, souvent critiquée pour son archaïsme, montre en remettant au gout du jour la figure de cette sainte visionnaire et docteur de l’Eglise, que l'institution sait aussi apporter des réponses aux défis du monde d’aujourd’hui et de demain en puisant dans son histoire.

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