À l'occasion des 10 ans de son élection, nous revenons sur le parcours de l'archevêque du bout du monde devenu souverain pontife : le pape François. Comment la gouvernance de ce cardinal jésuite a-t-elle remodelé en profondeur l'Eglise ? À quel prix ?
Frédéric Mounier, journaliste, ancien correspondant du journal La Croix à Rome et auteur de Le pape François, une vie, aux presses du Châtelet et Dominique Barnérias, prêtre du diocèse de Versailles en discutent aux micros de Véronique Alzieu et Melchior Gormand.
Le 13 mars 2013, Jorge Mario Bergoglio, est élu pape à la surprise de tous. En effet, le nouveau souverain pontife "ne coche aucunes des cases" explique Frédéric Mounier. "Les cardinaux souhaitaient élire quelqu'un qui soit jeune, qui soit polyglotte, qui aime les voyages et qui soit en bonne santé" ajoute-t-il.
C'est son programme, tourné vers les périphéries et la priorité qu'il souhaitait donner à l'évangélisation qui a convaincu ses pairs quelques heures avant le verdict.
Alors que le monde entier se félicitait déjà de l'élection du prélat milanais Angelo Scola, c'est l'archevêque de Buenos Aires, qui est élu 266ème pape et choisit le nom de François en référence au saint d'Assise. Inconnu par la plupart des catholiques, François marque "par son humilité et sa simplicité dés le premier soir" se souvient le père Dominique Barnérias. On se rappelle de ses premiers mots adressaient aux fidèles du monde entier : "Je veux vous demander une faveur, avant de vous donner ma bénédiction, je vous demande votre prière, qui est la bénédiction du peuple pour son évêque."
Le choix d'élire un archevêque jésuite à la tête de l'Eglise est loin d'être anodin. La compagnie de Jésus est connue pour ses méthodes de gouvernances tournées vers la concertation et le discernement. "Il y a une forme de régulation de la démocratie à l'intérieure de la Compagnie qui est exactement le genre de modèle sur lequel fonctionne en ce moment le pape François donc c'est très important de prendre en compte cette origine jésuite de ce pape" analyse Frédéric Mounier.
Après la démission de Benoit XVI, les difficultés de gouvernance et les polémiques à laquelle la curie a pu faire face, François symbolise l'obéissance. Pour le père Barnérias "le pape François sait décider et se faire obéir parce qu'il a cette tradition là de l'obéissance chez les jésuites".
Le choix de porter le nom de saint François d'Assise, "l'ami des pauvres" et le saint patron de l'écologie, finit d'assoir l'identité ignatienne du nouveau pape. "Chez saint François d'Assise, on a la pauvreté choisie et donc on voit la pauvreté et la simplicité de ce pape qui ne veut pas habiter les appartements pontificaux et puis évidemment, le rapport à la création, à la nature qu'il va développer" résume Dominique Barnérias.
"Inattendu", "imprévisible", "direct", "dur" les mots pour qualifier le discours sans détours du pape argentin sont nombreux. Dès le début de son pontificat, François souhaite réformer une Eglise qui selon lui doit donner l'exemple et s'ouvrir au monde. On se souvient de son discours de 2014 , quelques jours avant Noël, où il dénonçait "les 15 maladies curiales". Vanité, commérage, divinisation des chefs, accumulation, pétrification spirituelle : le chef de l'Eglise appelle à une réforme spirituelle et matérielle. "C'est un changement de mentalité qui est demandé par le pape. Ces changements de mentalité ils sont à vivre à la tête mais aussi à vivre dans l'ensemble ecclésial. Il faut quitter l'autoréférencialité" explique le père Barnérias.
Dans la prolongation de Benoît XVI, François souhaite assainir les finances du Vatican, encore considérait comme un paradis fiscal à cette époque. Par exemple, il interdit les comptes anonymes à l'Institut pour les Oeuvres de religions, la banque du Vatican. Il réorganise aussi le travail au sein des dicastères. Ces subdivisions administratives de la curie romaine communiquent peu entre elles, n'ont pas d'objectifs fixés ou de plans de fonctionnement spécifiques. "Personne n'était responsable de rien et personne ne parlait à personne" explique Frédéric Mounier.
Cette réforme majeure a donné lieu à une nouvelle constitution qui est en train d'être mise en oeuvre : "Praedicate Evangelium" ("Annoncez l’Évangile")".
Elle regroupe cinq axes majeurs : l'évangélisation, la places des laïcs, la création d'un nouveau dicastère pour les pauvres, la lutte contre la pédocriminalité et une attention particulière portée aux finances de l'Eglise. Un texte révolutionnaire pour l'Eglise qui marque une décennie de réforme pour le pape François.
On notera également l'importance de la présence de joie et de la créativité dans son parcours et ses exhortations. Comme dans "Evangelii Gaudium", "Gaudete et Exsultate" ou "Amoris Laetitia" où ils invitent les fidèles à être avant tout "des apôtres de la joie".
Le pape François "veut une Eglise qui soit capable de créativité, d'aller vers les périphéries, des membres nouveaux, de relever des défis qui ne sont pas ceux d'autrefois" résume Dominique Barnérias.
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
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