Accueil
Trois femmes, chrétiennes de Marseille
Partager

Trois femmes, chrétiennes de Marseille

RCF,  -  Modifié le 5 novembre 2019
A l'occasion de l'Assemblée plénière des évêques où sont invités des non-évêques, on tente de reconnaître le rôle des femmes dans l'Eglise, notamment dans les diocèses

Demain mardi, s’ouvre à Lourdes l’Assemblée plénière des évêques, où, pour la première fois sont invités des non-évêques: chaque évêque doit en effet venir avec deux représentants, des laïcs, ou des religieux ou religieuses. Cela va donc représenter près de 200 personnes, parmi lesquelles il y aura, semble-t-il, de nombreuses femmes, signe du rôle croissant qu’elles prennent aujourd’hui dans la vie quotidienne de l’Eglise. On sait qu’environ 12.000 laïcs sont employés (à titre bénévole ou non) par les diocèses, dont plus de 90% des femmes.

Reconnaître ainsi le rôle de ces femmes, et renvoyer au passage une image moins masculine de l’Eglise est une initiative réjouissante. Tout comme la demande du synode de l’Amazonie de créer des « ministères » (c’est-à-dire des responsabilités) pour les femmes, et de revoir la question du diaconat féminin.

J’ai eu l’occasion dans une chronique pour la Croix l’Hebdo d’écrire que je trouvais cela plutôt réconfortant que l’Eglise catholique songe enfin à donner une plus grande visibilité à toutes ces femmes, qui au passage n’ont pas attendu de voir leur rôle officiellement reconnu pour donner de leur temps dans la vie de l’Eglise.  Mais il s’est trouvé quelques esprits un peu grincheux, pour me reprocher cet enthousiasme. Selon eux, je serais une dangereuse féministe, trop encline à écouter la mode de son époque et le fameux paritarisme, et donc peu respectueuse de la grande tradition de l’Eglise, qui n’a jamais, disent ces personnes, reconnu pour les femmes un rôle officiel.

J’en étais à méditer ces critiques, quand, au cours de mon week-end de La Toussaint, je suis allée visiter à Marseille l’abbaye Saint Victor.  C’est un magnifique monument, abbaye fondée au Ve siècle par saint Cassien, qui domine le vieux port avec sa silhouette semblable à un château fortifié du Moyen-âge. La crypte, du Ve siècle, est restée en l’état, avec tout un cimetière des premières communautés chrétiennes marseillaise. Et me voici donc, sous la terre, dans cette crypte, à remonter le temps du début du christianisme sur les rives de la méditerranée, quand mon œil fut attiré par trois magnifiques épitaphes, gravés sur des tombes datant du V et VIe siècle. Trois épitaphes, signe d’une déférence extrême, pour trois femmes justement, premières chrétiennes de Marseille, qui ont suffisamment marqué leur époque pour que leur communauté ait demandé que leur souvenir soit conservé, au-delà de leur mort.

Je m’approche de plus près, et découvre d’abord l’existence d’une Tilisola, mère abbesse du VIIe siècle, que l’on nous demande de ne pas oublier. A ses côtés, Eusebia, elle aussi abbesse d’une autre abbaye, et qui, est-il écrit, « a soutenu par sa vie et ses actes la gloire du nom de notre Seigneur ». La troisième dame est la « noble Eugenia », elle aussi chrétienne au VI e siècle, issue d’un sang illustre, nous apprend l’épitaphe, qui en fait même un charmant poème : " joyeuse et empressée, elle courait rassasier les affamés, tant elle avait faim de tes festins, O Paradis, mais aussi les captifs, au prix de sa fortune, elle les délivrait de leurs chaînes iniques, et ceux qui avaient été chassées de leur terre, elle les rendait à leur famille. Bien que gisant dans sa tombe, elle est vivante par ses mérites " conclue notre poète anonyme…

S’agirait-il là, derrière ces épitaphes, de la main terrible d’une féministe invétérée de l’époque, une sorte de comité de la jupe des premiers siècles ? Non, c’est simplement raconté ici, sur ces vieilles pierres, la vie des premières communautés chrétiennes, où les femmes jouaient un rôle non négligeable dans la transmission de la foi, un rôle semble-t-il bien reconnu par leurs coreligionnaires de sexe masculin…

Ces trois femmes, Tilisola, Eusebia, et Eugenia, dont nous avons là le touchant témoignage de foi, m’ont fait penser à un autre progressiste dangereux, le pape Benoît XVI lui-même, qui, le 14 février 2007, lors d’une audience place Saint Pierre, consacrait un long développement aux premières chrétiennes, celles notamment dont les Actes des Apôtres révèlent l’existence, expliquant « que l’histoire du christianisme aurait eu un développement bien différent si il n’y avait eu le généreux apport de nombreuses femmes ». « Au premiers temps de l’Eglise, la présence des femmes dans l’Eglise était tout sauf secondaire » poursuivait le pape. Aux premiers temps, donc… De quoi donner le sentiment, parfois, que l’Histoire marche à reculons….  
 

Cet article vous a plu ?
partager le lien ...

RCF vit grâce à vos dons

RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation  de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

  • Ce don ne me coûte que 0.00 € après déduction fiscale

  • 80

    Ce don ne me coûte que 27.20 € après déduction fiscale

  • 100

    Ce don ne me coûte que 34.00 € après déduction fiscale

Faire un don