Le 15 août 2021, presque 20 ans après avoir été chassés du pouvoir, les talibans reprenaient Kaboul, la capitale afghane. En seulement 10 jours, les forces gouvernementales se sont effondrées sous les yeux du monde entier, sans le soutien américain. Khatera Amine a vécu de plein fouet la prise de Kaboul, sa ville natale.
Trois ans après, elle nous livre son sentiment.
On se souvient encore de ces scènes difficiles d’Afghans qui s’accrochent aux ailes des avions pour tenter de fuir le pays. Khatera Amine a grandi dans ce pays qu’elle aime, mais ce jour-là, tout s’écroule pour elle, en premier lieu sa liberté. Trois ans après l'assaut des talibans contre Kaboul, elle ressent toujours la même tristesse pour son pays et surtout pour les femmes, premières victimes du régime islamique.
“Le 15 août est le jour le plus noir pour toutes les femmes en Afghanistan, se souvient Khatera, c’est une guerre contre les femmes. Et cette guerre a pour but de les isoler. Cela fait 3 ans, mais il y a toujours la même tristesse. Nous avons perdu chaque droit pour lequel nous nous battions. Le droit à la liberté, comment travailler, comment être une jeune femme, comment travailler pour la démocratie" rappelle-t-elle.
Traquée par les talibans, Khatera n’était plus en mesure de travailler en tant que consultante médias au Centre de recherche et de surveillance militaire, de Kaboul. Comme beaucoup, elle et sa famille ont alors été contraints de vivre cachés, car depuis la chute de la capitale, la situation des femmes a empiré.
“J’ai peur pour les nouvelles générations en Afghanistan, pour les femmes qui avaient bénéficié d’une éducation et avaient un beau futur devant elles. J’ai peur pour mon pays et sa quête de démocratie. J’ai peur pour tous les laissés de côté, qui ont l’impression d’être en prison et ne peuvent rien faire” ajoute la jeune femme non sans émotion et avec lucidité.
Depuis plusieurs mois, Khatera est réfugiée aux Etats-Unis. Elle a dû quitter son pays à contre cœur, pour protéger sa vie. Malgré la distance qui la sépare désormais de ses parents et de sa sœur, restés en Afghanistan, la jeune femme est loin de baisser les bras. “On se bat depuis plus de trois ans pour convaincre le régime actuel de prendre en compte le droit des femmes et leur permettre d'aller à l’école, malheureusement nous échouons pour l'instant. Les nouvelles de Kaboul sont les mêmes, et elles ne sont pas bonnes, admet-elle. Mais nous continuons notre combat pour faire changer les lois qui vont à l'encontre du droit des femmes.”
L'histoire de Khatera Amine a été mise en lumière, grâce à sa correspondance avec une journaliste française, Maurine Bajac, avec qui elle a co-écrit un livre Je vous écris de Kaboul, aux éditions Albin Michel. Une notoriété qui lui a permis de rendre visible son combat pour les femmes et qui a été déterminante dans sa fuite du pays. Mais en Afghanistan, des millions de femmes n’ont pas eu cette chance et vivent toujours la peur au ventre, sous le régime des talibans.
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