En visite mardi 27 juin au tribunal judiciaire de Lyon, Éric Dupond-Moretti a reçu un accueil glacial de la part de greffiers en colère. Ils dénoncent des conditions de travail indignes et une rémunération qui ne l'est pas moins.
"Les greffiers méritent mieux", "les comptes ne sont pas bons" : au tribunal judiciaire de Lyon, mardi 27 juin, les pancartes brandies par plusieurs greffiers en colère sont éloquentes. Le message adressé à Éric Dupond-Moretti, venu pour l'installation d'un comité d'usagers, on ne peut plus clair. Des dizaines de membres du personnel lui tournant le dos en guise de bienvenue, l'accueil est pour le moins inattendu. "Je trouve cela très discourtois", a tancé le garde des Sceaux, visiblement surpris par une telle entrée en matière.
"Pour que les greffiers, qui courbent l'échine depuis des années, manifestent de cette façon-là, c'est qu'il y a un grand malaise, estime plutôt Christophe Douchet, greffier au tribunal judiciaire de Marseille et membre du syndicat des greffiers de France. Nous les greffiers, on n'est pas habitué à une telle mobilisation. La dernière de cette importance remonte à 2014, voilà dix ans. En général on ne dit rien, malgré nos conditions de travail assez lourdes."
Pour que les greffiers, qui courbent l'échine depuis des années, manifestent de cette façon-là, c'est qu'il y a un grand malaise
Le ministère de la Justice s'est contenté de rappeler que la rémunération des greffiers a augmenté de 12% en trois ans. "Ce n'est pas tout à fait ça, rétorque Christophe Douchet. On ne sait pas vraiment d'où sortent ces 12%. On suppose qu'y sont inclus les 5% d'augmentation de tous les fonctionnaires, qui ne sont donc pas spécifiques à notre profession. Pour le reste, il s'agit de primes qui ne comptent pas pour la retraite, ce n'est pas suffisant. On nous avait annoncé une revalorisation beaucoup plus grosse." À Lyon, le garde des Sceaux s'est défendu en promettant l'embauche d'ici la fin de l'année de 9 magistrats du siège, 4 magistrats du parquet, 11 greffiers, 18 adjoints administratifs et 92 contractuels pour le ressort du tribunal judiciaire de Lyon.
La veille, lundi 26 juin, quelques centaines de greffiers en colère s'étaient rassemblés devant plusieurs tribunaux de France pour exprimer leur ras-le-bol devant le "mépris" dont ils se considèrent victimes. L'après-midi, l'intersyndicale avait été reçue place Vendôme, sans grand résultat. Parmi ses revendications, une nette revalorisation du métier et le passage de 110.00 greffiers actuellement à 16.000, un nombre qui serait conforme aux "standards de nos voisins européens", a soutenu Hervé Bonglet, secrétaire général de l'Unsa Services judiciaires. Un projet de loi porté par Éric Dupond-Moretti prévoit, après passage au Sénat, le recrutement de 1.800 greffiers supplémentaires. Bien en-deçà des espérances syndicales. "On a lancé un préavis de grève pour lundi 3 juillet", annonce Christophe Douchet. Les greffiers ne comptent plus courber l'échine.
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