Quelques heures avant la sortie de la troisième encyclique du pape François, dans la 8ème année de son pontificat, à la veille de la fête du Poverello, Habitat et Humanisme accueillait à Saint Affrique, dans le département de l’Aveyron, des personnes de cultures très différentes, venues d’horizons qui ne l’étaient pas moins, dans le cadre de l’inauguration d’un centre d’accueil pour des demandeurs d’asile.
Au cours de cette réunion, il fut présenté le parcours de ceux qui subissent l’exil, quittant une terre inhospitalière en raison de la guerre ou de la misère, cette autre violence qui tue dans le silence. Si les armes ne parlent pas, la faim et les conditions de vie sordides qu’elle cause sont dramatiquement meurtrières.
Il était heureux d’entendre, lors de cette inauguration, des voix qui témoignaient d’une fraternité, non pas d’un vague espoir mais d’une réalité actée, fruit d’un engagement partagé par les autorités publiques, civiles et religieuses.
Dans ce centre d’accueil, les divisions n’avaient pas de place pour être à leur place, hors-jeu.
Chaque génération, dit François, doit faire siens les luttes et les acquis des générations passées et les conduire à des sommets plus hauts encore. De telles rencontres doivent susciter une hospitalité, constamment à bâtir tant elle est une exigence spirituelle. S’en affranchir est toujours une déshumanisation.
L’ancien Maire de Saint Affrique, qui a contribué à cet espace de fraternité, disait magnifiquement : nous étions tous des étrangers et étrangement nous faisions humanité, ajoutant, ouvrons nos territoires de ‘vraie vie’ au vaste monde de la misère et de la douleur. Ne serait-ce pas cela faire humanité dans un mélange de rêves et de désespoirs lucides...porteurs de rêves.
Ces rêves, sont ceux de Martin Luther King, de Nelson Mandela, et de tant d’autres, connus ou anonymes qui, là où ils sont, refusent un face à face ou une simple juxtaposition pour privilégier le vivre-ensemble.
Sans ces rêves, la Société sombre. Ils naissent d’un dialogue qui, suivant la réflexion de François, a besoin d’être enrichi et éclairé par des justifications, des arguments rationnels, des perspectives différentes, des apports provenant de divers savoirs et points de vue.
Les différences peuvent sembler des obstacles. Non, dit François, elles doivent contribuer à une convergence dynamique que l’intelligence peut saisir.
Magnifique, cette confiance en l’homme !
Si la fraternité relève d’une inclinaison du cœur, elle procède également de la conviction que tout être humain possède une dignité inaliénable et une dignité qui correspond à la nature humaine, indépendamment de tout changement culturel, pour reprendre les mots de l’encyclique.
« La vie, c’est l’art de la rencontre même s’il y a tant de désaccords dans la vie » (expression de Vinicius de Morales que reprend François). Or, l’art est une culture, un enracinement, signifiant pour le Pape une invitation à se rencontrer, construire des ponts, envisager quelque chose qui inclut tout le monde et passionne.
La fraternité est une grâce, une gratuité se révélant une source que chacun a en lui-même.
Dans ces jours de l’après-crise où semble s’estomper le désir brûlant des enfièvrements qui ont trop longtemps déchiré la fraternité, l’heure est de faire surgir ces espaces qui intègrent et rassemblent.
Bernard Devert
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