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Effondrements rue de Tivoli : une veillée pour les victimes rassemble 300 Marseillais

Un article rédigé par Maud de Bourqueney - Dialogue RCF (Aix-Marseille), le 11 avril 2023 - Modifié le 17 juillet 2023

Lundi soir, une veillée de prière a rassemblé 300 personnes en l’église Saint-Michel à Marseille, située tout près de la rue de Tivoli, où trois immeubles se sont effondrés dans la nuit de samedi à dimanche. Antoinietta, une paroissienne âgée de 88 ans, est décédée dans le drame.

Une veillée pour les victimes de la rue Tivoli organisée en l'église Saint Michel à MarseilleUne veillée pour les victimes de la rue Tivoli organisée en l'église Saint Michel à Marseille

« La solidarité s’organise et la prière s’entretient.» Voilà comment le cardinal Jean-Marc Aveline résume cette nouvelle phase après le choc des effondrements.

 

Ce lundi 10 avril, vers 20h, alors que les secours ont déjà retrouvé six corps dans les décombres de la rue de Tivoli, et cherchent encore deux habitants, une veillée de prière rassemble 300 Marseillais, croyants ou non, en l’église Saint-Michel à Marseille, située dans le quartier du drame. Parmi eux, des élus comme le maire Benoît Payan, mais aussi des marins-pompiers.

 

Un peu plus tôt dans la journée déjà, une soixantaine de paroissiens se sont rassemblés pour une messe en hommage aux victimes, aux personnes délogées et aux secours.

 

Le prêtre de cette paroisse, le père Rémy de Mauvaisin, est particulièrement touché. Il a perdu une paroissienne dans l'effondrement. Elle s’appelait Antoinietta et avait 88 ans :

 

Elle venait tous les dimanches, elle était très fidèle, quelqu’un m’a dit : si elle est encore en vie sous les décombres, elle doit encore prier.

 

Parmi les Marseillais venus assistés à la cérémonie : Christine et Lucien, ils tenaient à être là :

 

On est venu par solidarité avec les familles endeuillées, toutes celles qui sont délogées, en tant que Marseillais et Marseillaises on doit être tous là. On ne peut pas faire plus, donc le minimum c’est de venir leur rendre hommage. 

 

La cérémonie, organisée par l’œuvre Allemand, organisation de jeunesse située rue Saint-Savournin, près du drame, était présidée par le cardinal Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille. Il est revenu sur le choc d’un tel drame en plein week-end de Pâques :

 

Nous venions de fêter la résurrection du Christ lorsque la Mort, survenant à l’improviste, a emporté les vies de nous voisins. C’est là le paradoxe de la foi des Chrétiens : croire en la puissance de la Résurrection et se tenir humblement et délicatement au chevet de ceux qui sont affrontés à l’épreuve de la souffrance et de la mort. Où serait l’Eglise si elle n’était pas là ?

 

Lors de la veillée, une minute de silence est observée, puis des jeunes de l’œuvre Allemand viennent allumer des bougies avec le cierge pascal et les déposer sur l’autel.

 

 

Homélie du Cardinal Jean-Marc Aveline

 

Chers amis,

C’est avec beaucoup d’émotion que nous sommes réunis ce soir dans cette église Saint-Michel, celle du quartier de la rue de Tivoli, là où le drame s’est produit, dans la nuit de samedi à dimanche, un peu après minuit.

L’explosion, la déflagration, l’effondrement : depuis hier matin, nous ne cessons de repasser en boucle ces minutes fatidiques où la vie des habitants de ce quartier a basculé. À l’effondrement a succédé l’incendie, puis les évacuations des immeubles proches, puis la longue attente, avant que ne commence un décompte funèbre au fur et à mesure que des corps sont retrouvés, cinq pour l’instant, mais ce décompte n’est pas encore terminé.

Une fois de plus, Marseille s’est réveillée meurtrie.

 

Bien sûr, on ne peut s’empêcher de vouloir trouver une explication à ce drame. Même si tout Marseillais garde en mémoire ce qui s’est passé, il y a deux ans et demi, à la rue d’Aubagne, lorsque d’autres immeubles s’étaient effondrés en plein Centre-Ville, nous nous trouvons devant une tout autre configuration : ni la négligence des propriétaires face à l’insalubrité des logements, ni l’insolence des marchands de sommeil profitant sans scrupule de la détresse des plus pauvres, fléaux contre lesquels il nous faut encore lutter, ne sont ici à déplorer. Certes, la police et la justice feront leur travail pour tenter de déterminer les causes de ce drame, mais il ne nous appartient pas d’en préjuger.

 

Ce soir, c’est pour accompagner de notre compassion et de notre prière tous ceux qui sont affectés par cet événement que nous sommes venus dans cette église. Tout d’abord, nous sommes en communion avec les personnes victimes, avec leurs familles et avec tous leurs proches. Leur angoisse est d’autant plus grande qu’il faut encore attendre que les secours progressent au milieu des gravats. Mais l’espoir, même s’il s’amenuise, doit demeurer jusqu’au bout, comme vous le disiez hier soir, Monsieur le Maire.

 

Et puis nous pensons à tous ceux qui, habitant des immeubles proches, ont été évacués, sans savoir encore s’ils pourront retrouver leurs logements, et, si oui, dans quel délai et dans quelles conditions. Nous les rejoignons dans leur inquiétude et dans cette soudaine précarité, que s’efforce cependant d’atténuer, et ce depuis les premières heures du drame, un magnifique élan de solidarité. Je sais que les services sociaux de la Ville ont mis en place un dispositif visant à coordonner la réponse aux besoins d’assistance des personnes évacuées, et qu’un point de collecte unique des dons sera opérationnel dès demain matin à la Mairie de secteur des 4e/5e arrondissements. Sont utiles des vêtements, des chaussures, des couvertures, des produits d’hygiène ou encore des produits pour les bébés, etc. Mais il faut aussi penser au logement, dans la durée, des personnes évacuées et aussi à l’accueil et au soutien des familles des personnes disparues. Soyez sûr, Monsieur le Maire, que l’Église catholique apportera son concours, sous quelque forme que ce soit, à cet élan de solidarité.

 

Mais ce soir, je voudrais nous inviter tous au recueillement. Permettez-moi de saluer tout particulièrement celles et ceux d’entre vous qui ne partagent pas la foi des chrétiens mais qui sont venus dans cette église pour exprimer par leur présence la compassion qui habite leurs cœurs. Soyez les bienvenus. Je voudrais également exprimer notre profonde reconnaissance à tous les sauveteurs qui continuent, pendant que nous sommes ici, leur labeur incessant, commencé quelques minutes à peine après l’explosion, et que l’incendie a rendu particulièrement difficile et redoutablement périlleux pour leur propre vie. Je salue tout particulièrement le bataillon des Marins-Pompiers. Grâce à eux, grâce à vous, Amiral, la population de Marseille, même si elle est meurtrie, se sent toujours rassurée et secourue.

 

Pour les chrétiens, ce drame est survenu alors que nous venions précisément de finir la célébration de la grande veillée pascale, samedi soir. Nous venions de fêter la Résurrection du Christ lorsque la mort, survenant à l’improviste, a emporté les vies de nos voisins. C’est là le paradoxe de la foi des chrétiens : croire en la puissance de la résurrection et se tenir humblement et délicatement au chevet de ceux qui sont affrontés à l’épreuve de la souffrance et de la mort. C’est là le sens profond de l’espérance de Pâques : ne jamais oublier que le Ressuscité, c’est le Crucifié, l’homme des douleurs qui a vaincu la mort.

 

Paul Claudel disait qu’à la question de la souffrance, Dieu ne répond pas par une explication, mais par une présence. C’est ce que les chrétiens ont « la faiblesse de croire », comme disait Michel de Certeau. C’est surtout ce qu’ils essaient de vivre, humblement et fraternellement. Et nous savons tous d’expérience qu’il faut beaucoup d’humilité pour faire un peu d’humanité. Les chrétiens n’ont certes pas le monopole de la générosité ni de la compassion : il s’en faut ! Mais ils ont reçu mission de témoigner de ces paroles si belles et si radicales de Jésus : « Tout ce que vous ferez au plus petit d’entre mes frères, c’est à moi que vous le ferez » (Mt 25, 40). Et encore : « Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin des temps » (Mt 28, 20).

 

Ce soir, que la prière des uns et l’affection des autres se rejoignent en une unique espérance, en communion de fraternité avec tous ceux qui sont affectés par le drame de la rue de Tivoli. Et que la Vierge Marie, notre Bonne Mère, montre à ses enfants de Marseille, meurtris mais courageux, la tendresse et la bonté du Seigneur notre Dieu !

 

 

Amen !

 

 

+ Jean-Marc Aveline
Cardinal archevêque de Marseille 

 

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