Au lendemain de l'élection d'Emmanuel Macron, la France sort divisée d'une campagne présidentielle pour beaucoup difficile, y compris pour les chrétiens. Une campagne qui s'est déroulée alors que la crise sanitaire avait déjà cristallisé les oppositions. Quelle est la voix des chrétiens au lendemain des élections ?
Au lendemain de la réélection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République, les sentiments sont partagés. La Conférence des évêques de France n'avait donné aucune consigne de vote, ce qui n'a pas empêché des prêtres, des laïcs et des associations de faire entendre leur voix. Ainsi, le Secours catholique, qui avait appelé à voter contre l’extrême droite. Pour l'ONG, c’est "un soulagement", déclare nettement Jean Merckaert, directeur du plaidoyer France au Secours catholique. "La candidature de Marine Le Pen était une candidature ferment de division, d’exclusion d’une partie la population et en particulier des plus vulnérables, qui vivent sur notre sol, les étrangers, et aussi de division entre appartenances religieuses." Pour autant, il reste fort à faire...
Les protestants avaient eux aussi exprimés leur inquiétude face à une éventuelle victoire de Marine Le Pen. C’est "un petit soulagement" qu’elle ne soit pas élue, convient Emmanuelle Seyboldt. La présidente du conseil national de l’Église protestante unie de France (ÉPUdF) exprime surtout "une grande tristesse devant la division de la société française quel que soit celui qui est élu". "Cette partition en deux et même en trois est extrêmement inquiétante." La présidente de l’ÉPUdF exprime son "inquiétude pour les cinq ans qui viennent".
Du côté de la CEF, c’est aussi un "soulagement", exprime le Père Vincent Breynaert, le responsable de la pastorale des jeunes et de la pastorale des vocations au sein de la Conférence des évêques (CEF). Il exprime lui aussi une forte "préoccupation devant les fractures" de notre société.
Marine Le Pen ou Emmanuel Macron ? Pour beaucoup, c’était choisir entre la peste ou le choléra, a-t-on entendu dire durant l’entre-deux-tours. Pour les chrétiens aussi le choix était difficile : les questions bioéthiques pointée du doigt dans le bilan du président Macron, l’accueil de l’étranger questionné dans le programme de Marine Le Pen. Un clivage que l’on l’a beaucoup senti parmi les chrétiens.
Au sein des aumôneries étudiantes également, "la campagne n’a pas été facile", raconte Vincent Breynaert. Il y a eu des "invectives" et une "polarisation" qui ont suscité de fortes tensions parmi les jeunes. Il a même fallu parfois rappeler à certains de "respecter" l’espace de l’aumônerie "comme lieu de fraternité, de prière et d’approfondissement de la foi".
Cette campagne s’est déroulée alors que "la pandémie" avait déjà "aggravé les fractures et les oppositions ", note Emmanuelle Seybolt. Les chrétiens n’ont pas été épargnés par les débats tendus, voire "une absence complète de dialogue", déplore la présidente de l’ÉPUdF, entre pro et antivax, partisans et opposants au passe sanitaire… "Il y a eu des tensions très fortes à l’intérieur des communautés." Au point que certains ont préféré ne pas assister au culte ou à la messe, quand d’autres se désintéressaient des mesures sanitaires.
Pour beaucoup, la défaite de Marine Le Pen n’efface pas le sentiment d’inquiétude devant la victoire d’Emmanuel Macron. "On a tiré un bilan plus que mitigé du quinquennat d’Emmanuel Macron", confie Jean Merckaert. Il rappelle que "les plus pauvres sur ce territoire sont sortis appauvris de ce quinquennat". "La plupart des Français - même s’ils n’en ont pas toujours le sentiment - ont connu plutôt une progression dans leur pouvoir d’achat, hormis le premier décile c’est-à-dire les 10% le plus pauvres."
"Trouver les voies du dialogue", ce doit être "la priorité pour les cinq ans à venir", selon le directeur du plaidoyer France au Secours catholique. Selon Jean Merckaert, la "méthode utilisée par Emmanuel Macron a été ressentie par beaucoup comme humiliante". Un constat que partage Emmanuelle Seybolt : "Il y a eu une sorte d’exaspération qui est montée où de nombreuses personnes ont eu l’impression de ne pas compter, d’être humiliées en permanence par les politiques mais aussi par les institutions."
Il reste fort à faire pour rassembler un pays divisé, et cela semble la priorité pour les grandes voix chrétiennes invitées sur RCF au lendemain du second tour. Sans doute faut-il commencer collectivement par abandonner l’idée que l’on a élu "un sauveur" ou "quelqu’un qui porterait seul le fardeau des changements à vivre", suggère Vincent Breynaert. Selon porter un regard chrétien sur cette élection c’est d’abord "prendre conscience que c’est un peuple ensemble qui doit avancer".
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