Gilles Hériard Dubreuil est chercheur indépendant, et co-initiateur du courant pour une écologie humaine. "Il y a cette idée que nous sommes en face d’une nature en péril. Seulement l’écologie voit la question selon le fait qu’il faille protéger la nature de l’homme. Comme si l’homme était le problème. C’est une question assez récente. Nous pensons que tout est lié. C’est ce que dit le pape François dans Laudato Si’. La nature, l’homme, c’est un tout. Et quand on le dissocie, comme c’est arrivé avec la modernité, on aboutit dans une situation où ces liens sont brisés. Et c’est ça l’origine du problème" explique-t-il.
Depuis plusieurs semaines, nous assistons avec effroi à l’embrasement de l’Australie. Une peur qui en dit beaucoup sur nous, et sur notre rapport à la nature. "C’est une très belle illustration de ce fameux "tout est lié". En réalité, c’est assez complexe. Cela fait jouer le global, le local, l’histoire, les enjeux de changements climatiques. Il y a eu avant l’arrivée des Européens, des populations qui ont réussi à construire un rapport avec la nature. Depuis l’arrivée des Européens, la relation s’est distanciée" ajoute-t-il.
Face à cela, l’homme peut se tétaniser. Pourtant il existe des moyens d’action. "La question est de savoir qui doit agir. Les systèmes de décision internationaux aboutissent plus ou moins à des échecs. Nos systèmes de décision sont en difficulté. Dans une société individualiste, c’est chacun pour soi, ou le marché pour tous. Ces questions ne doivent pas être traitées de l’extérieur, mais par les personnes concernées. C’est quelque chose que la modernité a partiellement effacé. Il n’y a pas d’autre solution que d’aider les gens à se relever pour prendre en charge leur situation" lance le chercheur.
Ce dernier ajoute qu’aujourd’hui, "le progrès technique est subi, non souhaité. C’est inéluctable. Chaque fois qu’une technique est disponible, dès qu’elle peut générer du profit, elle est mise en œuvre. Et la bioéthique suit. La question est de savoir si cette technique est au service de l’homme, ou d’un processus de productivité et de profit. Nous avons abandonné une relation bienveillante avec la nature. C’est même notre nature humaine que nous sommes en train d’aborder de manière utilitaire".
Pour Gilles Hérard Dubreuil, la clé du changement c’est la relation, la reconstruction des liens. "Notre travail est de reconstruire tous ces liens, à tous les niveaux. Les élus ne peuvent pas faire ça seuls. L’unité de base, c’est le territoire, là où les hommes vivent. C’est la rencontre d’une géographie et d’une affinité. Cela passe par les bonnes volontés, les bonnes initiatives. C’est une forme de maturité politique : le souci de l’autre, le souci de la nature et le souci de soi-même" conclut-il.
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