La famille ignatienne s'est réunie à Marseille lors du week-end de la Toussaint. Plus de 7000 personnes étaient présentes dans une ambiance festive de retrouvailles. Une ambiance toutefois marquée par les révélations de la Ciase sur les abus sexuels dans l’Église, dont il a été fortement question durant les célébrations. Pour le supérieur des jésuites, le père François Boëdec, ce rassemblement ne pouvait pas être "hors sol".
"Conversion", car la famille ignatienne s’est réunie 500 ans après l’épisode du boulet de Pampelune. Commémorer une blessure - celle causée par un boulet du canon en 1421 au siège de Pampelune - cela semble étonnant. Mais celle-ci a été le point de départ d’un chemin de conversion pour Ignace de Loyola. Et lors de ce rassemblement de Marseille, les participants ont été invités, dans une démarche très ignatienne, méditer sur leurs propres "boulets". Et à se demander à quelle conversion ils sont eux-mêmes invités.
"Conversion", ce mot a résonné de façon particulière en cette fête de la Toussaint, car il y a un mois à peine, le rapport de la Ciase était remis publiquement et révélait l’ampleur des abus sexuels dans l’Église. Il en a été fortement question lors du rassemblement qui a débuté avec un temps de recueillement et de prière pour les victimes, pour l’Église et pour sa conversion. Deux tables-rondes ont été organisées, sur les thèmes : "Quels visages d’Église pour demain ?" (retransmise sur RCF) et "Après le rapport de la Ciase quelle espérance possible ?" Des tables-rondes qui ont fait salle comble.
Pour François Boëdec, ce rassemblement ne pouvait pas être "hors sol". "Ce serait vraiment contraire à la spiritualité ignatienne, qui est une spiritualité extrêmement incarnée, qui part de la réalité, du point où en sont les gens, de ce que vivent les personnes, pour, à partir de ce qui se vit, avancer dans la vérité, vers les autres et vers Dieu." Malgré la joie des retrouvailles - cela faisait 15 ans depuis le premier rassemblement de la famille ignatienne à Lourdes - il y avait aussi "une grande gravité à la suite du rapport de la Ciase", selon François Boëdec. "On voit bien qu’on est tous extrêmement travaillés par cela, ce n’est pas toujours évident d’avoir à se situer, parfois on peut se laisser emporter par la peur, par la colère, par le découragement… et c’est tout à fait compréhensible."
La spiritualité ignatienne, François Boëdec l’a redit, est une spiritualité de l’engagement, riche des exercices spirituels de saint Ignace, dont le maître mot est le discernement. Aussi, malgré un contexte douloureux, il était nécessaire aussi d’essayer de "ne pas en rester là". Et pour avancer, "il ne faut ne pas vivre ça seul, il faut en parler, être ensemble, pour essayer de se soutenir et avancer vers toujours plus de vérité". "C’est comme ça qu’on souhaite que l’Église avance", ajoute le supérieur des jésuites alors que l’Église a entamé son synode sur la synodalité.
La spiritualité ignatienne c’est "une certaine manière de regarder le monde : de manière positive, non pas avec naïveté mais de la façon dont Dieu regarde le monde". François Boëdec cite ce verset de saint Jean : "Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique" (Jn 3, 16). Pour le jésuite, "Dieu, par son fils, s’est engagé vis-à-vis de l’humanité, il croit dans cette humanité, parfois peut-être plus qu’elle-même ne croit en elle… Le Christ sait mieux que quiconque ce qu’est la réalité du cœur de l’homme".
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