Le mois de novembre prend une teinte particulière chaque année, alors que des hommes du monde entier laissent pousser fièrement leur moustache, s'engageant dans un mouvement qui va bien au-delà de la simple esthétique. C’est ce qu’on appelle Movember, un jeu de mots entre "moustache" et "november", véritable phénomène visant à sensibiliser et à briser les tabous liés à la santé masculine.
Depuis son apparition en 2003, le mouvement Movember met en lumière chaque année en novembre des problèmes de santé qui touchent spécifiquement les hommes, mais qui restent souvent négligés ou ignorés. Les cancers masculins et les troubles de la santé mentale chez les hommes sont autant de sujets qui nécessitent une attention particulière.
Un premier objectif de Movember est de sensibiliser aux cancers masculins, tels que celui de la prostate et celui du testicule. Des campagnes de dépistage précoce et des discussions ouvertes sont encouragées pour aider à détecter ces pathologies à un stade précoce, augmentant ainsi les chances de guérison.
Le plus fréquent chez l’homme avec 60 000 nouveaux cas détectés chaque année selon les derniers chiffres de l'Institut National du Cancer, le cancer de la prostate se développe dans la glande de la prostate, une petite structure en forme de noix qui fait partie du système reproducteur masculin.
Mais à quoi sert la prostate ? "Je suis investi depuis deux ans dans Movember et l'association CerHom, et je constate que beaucoup d'hommes ne savent ce qu'est la prostate", déplore Olivier Carduner, diagnostiqué d'un cancer en 2020. C'est un organe qui se trouve sous la vessie et qui joue un rôle important chez les hommes, car il permet l'éjaculation, et donc la production - avec les testicules - de spermatozoïdes. 10 % de ces cancers sont métastatiques, cela signifie que les cellules cancéreuses peuvent se propager dans tout le corps.
Même si ce type de cancer se soigne de mieux en mieux en France, 9 000 hommes décèdent chaque année de cette maladie. "On a tendance à l'oublier. Toutes les heures, un homme meurt de cette pathologie", rappelle Olivier Carduner.
La prostatectomie radicale (ou totale) est une intervention chirurgicale pratiquée pour le traitement du cancer prostatique. Elle consiste à retirer complètement la prostate et des vésicules séminales.
À l'inverse, le cancer du testicule n'est pas un cancer "de masse" comme celui de la prostate. Il y a environ 2 500 nouveaux cas en France chaque année, mais il est cependant le premier cancer de l'homme jeune, âgé entre 15 et 35 ans. "Imaginez un peu le désarroi et la difficulté psychologique à aborder cela quand on est jeune, et surtout quand on comprend que ce cancer peut avoir un impact sur la vie d'adulte", explique l'ambassadeur de Movember. Comme toute pathologie un peu lourde, elle doit être traitée rapidement. "C'est une maladie qui se soigne excessivement bien", rassure toutefois le Professeur Alexandre de la Taille, chef de service d'Urologie au CHU Henri Mondor de Créteil et président de l’Association Française d’Urologie (AFU).
C'est un constat partagé par les professionnels de la santé : les hommes ont du mal à parler de leurs problèmes de santé. "C'est une question qui pourrait presque faire l'objet d'un débat ou d'une thèse, car les explications sont diverses", souligne Olivier Cardiner avant d'ajouter "j'ai grandi à une époque où on entendait dire que les hommes ne devaient pas pleurer, se plaindre et devaient être fort. On se construisait en tant qu'homme avec ce type de discours".
Pourtant, les hommes meurent 5 à 6 ans plus tôt que les femmes. Pour pallier ce manque de parole, l'Association Françoise d'Urologie veut briser les tabous et faire changer les mentalités des hommes. "Culturellement, les hommes associent le médecin à la maladie. Ils vont voir les médecins non pas en prévention mais quand ils ne vont pas bien", explique le Professeur Alexandre de la Taille, contrairement aux femmes qui ont l'habitude dès l'adolescence d'aller voir le médecin généraliste ou le gynécologue pour le suivi de leurs problèmes intimes.
De plus, les hommes peuvent souvent hésiter à parler de leurs problèmes de santé mentale en raison des pressions sociales et des stigmates associés à la vulnérabilité et à la virilité. Le mouvement Movember cherche ainsi à briser ces barrières en encourageant les hommes à partager leurs expériences, à rechercher du soutien et à promouvoir la santé mentale positive. Un mouvement qui fête en 2023 ses 20 ans, à l'initiative de deux amis australiens : "ils ont perdu un proche, et ont décidé de sensibiliser les hommes en se laissant pousser la moustache", raconte Olivier Cardiner.
60 000 cas de cancer de la prostate chaque année, contre 61 000 cas de cancer du sein détectés chez les femmes. Mais "pas question de comparer. Il n'y en a pas un meilleur que l'autre. Nous regardons avec une grande admiration ce que les femmes et les médias ont réussi à faire avec Octobre Rose en termes de prévention", précise Olivier Cardiner. En effet, pour la santé masculine, c'est une autre histoire. La prévention s'intensifie chaque année pour Movember, mais doit encore se faire connaître.
Le dépistage pour le cancer de la prostate consiste à pratiquer un toucher rectal qui permet au médecin de vérifier le volume, la consistance et la texture de la surface de la prostate. Cet examen est inconfortable mais indolore.
Autre possibilité, étudier le dosage du PSA (antigène prostatique spécifique) qui permet, via une prise de sang, de mesurer son taux dans le sang. Le PSA est une protéine produite par la prostate, présente normalement en faible quantité dans le sang. Si le taux est trop élevé ou trop bas, il faut alors rapidement consulter.
Dans le cas du cancer du testicule, le message est simple : "Palpez-vous ! On parle facilement de la palpation des seins pour les femmes, ça doit être la même chose pour les hommes. Sous la douche, après une séance de sport, faites une petite palpation des testicules", informe Olivier Carduner. Et "si on commence à sentir un petit caillou, ou une petite anomalie dans le testicule, il faut aller consulter", préconise le Professeur Alexandre de la Taille.
Pour aller plus loin : https://www.ligue-cancer.net/73-savoie/actualites/luttons-contre-les-cancers-masculins-challenge-des-gentlemen
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
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