Bonjour à vous, nouvelle année.
Adieu 2020. Tu fus un temps de bégaiement (20-20), espérant qu’il ne se répète pas.
Où était, au cours de cette année, l’homme augmenté prônant l’avancée de l’intelligence artificielle quand il n’avait d’autres solutions que de se masquer, de se cacher pour se protéger. Les arrogances d’hier, nées d’une illusion de la puissance, se sont révélées pour ce qu’elles étaient, dérisoires.
La Société a gagné en humilité et par-là même en humanité.
Il nous faut poursuivre pour que 2021 soit l’année du care, du prendre-soin.
Emmanuel Levinas dit que les Hommes pleinement hommes sont ceux pour qui la spiritualité est fondamentalement une hospitalité exigeante. Il ajoute dans son ouvrage l’éthique et transcendance que l’humain commence dans la sainteté, avec comme première valeur de ne pas laisser le prochain à sa solitude, à sa mort.
De l’épreuve de la pandémie ne surgirait-il pas un nouvel horizon, la recherche d’un bien-être ; il s’inscrit dans un soin partagé qui n’est pas sans interroger cette course folle â arrêtée par la Covid 19 â vers des avoirs et des pouvoirs, mettant à nu bien des souffrances restées jusqu’alors sans soins.
Le confinement, paradoxalement, a mis à découvert des situations insupportables qu’on ne voulait pas voir.
Sans doute, comme le Petit Prince, dans l’épreuve, avons-nous vécu des temps d’apprivoisement de l’autre ; il est apparu ce qu’il est, un semblable à cent mille autres. Nous en avons fait un ami, tout change alors.
Des liens de fraternité sont nés de ce prendre-soin. Le sujet est de savoir si nous les maintiendrons et développerons, une fois la crise traversée. Il nous appartient, dans l’année qui vient, d’offrir une réponse décisive. Il s’agit ici, suivant les mots d’Emmanuel Levinas, d’une approche de sainteté qui n’est pas une perfection morale mais le premier critère de notre humanité.
Cette exigence ne se délègue pas, elle se construit dans la persévérance, chemin d’espérance.
Au moment où nous échangeons des vœux, comment ne pas se mobiliser pour faire naître cet espoir. Des vœux pieux ! Je retiens ce mot ; il est juste. Dans l’acte de construire, les pieux ne sont-ils pas retenus pour bâtir là où les terrains trop mouvants nécessitent des fondations sécurisées.
Ce monde a besoin de pieux ; voulons-nous en être pour choisir la vérité plutôt que la sincérité, la recherche de l’absolu plutôt que s’arrêter au relativisme.
Il n’y a de montées vers l’essentiel que là où l’on a pris soin d’évaluer les convictions qui nous portent. Un telle posture est libératrice des rigidités qui assombrissent, enferment et des intégrismes qui empêchent l’envol.
Alors, ancrés dans le réel, habités par cette recherche du vrai et du juste, refusant de rester à la surface des choses pour ne point oublier nos fondations, nous comprendrons que les racines de l’homme sont en avant de lui, suivant la belle expression de Zundel.
Cette reconnaissance ne se révèle-t-elle pas une naissance.
Comment ne pas souhaiter pour 2021 que cette liberté éclaire nos vies pour participer à un humanisme de lumière, celui qui donne à la fraternité toute sa dimension. Alors, suivant le mot de Régis Debray, nous veillerons à ce qu’elle ne fasse pas tapisserie pour l’inviter à faire quelques pas de danse.
Ces pas sont ceux qui mènent plus loin, là où nos rêves, ô surprise, s’entrevoient dans cet autrement qui, pour se proposer à notre responsabilité, transforme les relations. Reconnaissons que cette perspective n’est pas sans attrait pour bâtir une nouvelle année qui en soit le sillon.
Bernard Devert
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