Face aux enjeux climatiques qui prennent de plus en plus de place dans les débats publics et impactent toujours plus notre quotidien, l'éco-anxiété touche de nombreuses personnes à travers le monde. Ce phénomène se définirait comme "une peur chronique de la catastrophe environnementale" d'après l'American Psychological Association. Il est même parfois présenté comme un stress pré-traumatique, étant une anxiété anticipative des effets à venir du dérèglement climatique. Afin de mieux la comprendre et la gérer, des acteurs émergent ces dernières années pour accompagner les éco-anxieux et leur proposer des solutions concrètes.
L’éco-anxiété n’est pas toute jeune. Depuis des années déjà, les bouleversements climatiques génèrent des questionnements et sont source d’inquiétude pour trois quart de la population. Entre la sécheresse, les canicules, les feux de forêt ou encore les inondations, les aléas climatiques sont de plus en plus fréquents et alimentent cette angoisse. Pour Ludovic Maugère, chargé de la campagne "Tu flippes ?" du mouvement de mobilisation citoyenne On est prêt, "c’est une peur du futur, de voir ses habitudes ou son avenir être chamboulé".
Selon l’étude Obseca 2023 menée par On est prêt, l’éco-anxiété revêt différents niveaux d’intensité. Il semble ainsi que 75 % des répondants soient éco-conscients et préoccupés par les enjeux environnementaux, que 20 % soient éco-inquiets et 5 % fortement éco-anxieux, parfois à un niveau maladif. Contrairement à ce que l’on peut croire, ce phénomène ne concerne pas seulement les jeunes générations. "Sur les 3 500 sondés, il n’y a pas de différence majeure en fonction des catégories sociales et de l’âge", indique Ludovic Maugère.
Cependant, les plus jeunes sont souvent davantage instruits et impliqués sur ces questions, ce qui favorise l’éco-anxiété. Les parents comme les professeurs ne parviennent alors pas toujours à apporter les réponses nécessaires. Pourtant, "les parents ont un rôle décisionnel qui peut impacter la vie de leur enfant, en agissant à leur échelle et en le formant aux enjeux et métiers d’avenir", estime Irène Colonna, responsable du développement des programmes de mobilisation citoyenne à MakeSense. Quant aux professeurs, même s’il est difficile d’aborder le dérèglement climatique de manière légitime et sans créer d’inquiétude, "il faut en parler", considère Ludovic Maugère, "mais avec précaution".
"Ceux qui sont dans l’action vont moins être touchés par ces phénomènes", explique le chargé de campagne "Tu flippes ?" chez On est prêt. Au regard de la situation climatique et de la biodiversité, de nombreuses problématiques peuvent préoccuper et rendre anxieux face à un futur incertain. En cause notamment : "l’inaction du gouvernement et l’action inadaptée des grands décideurs", déplore Ludovic Maugère. Selon ce dernier, on ne peut qu’être anxieux quand on a conscience de cette réalité et qu’on n’est plus dans le déni.
Des groupes de paroles ont été mis en place par l’association MakeSense, dans l’objectif "de libérer la parole et les émotions, qui maintiennent ces personnes en état de stress et d’isolation", détaille Irène Colonna. Ainsi, le sentiment que personne n’agit autour d’elles est partagé par de nombreuses personnes éco-anxieuses. "On veut leur faire comprendre que ces émotions sont légitimes", explique-t-elle avant d’ajouter que "beaucoup de ces personnes sont simplement découragées". C’est pourquoi l’association RAFUE existe et propose l’aide de professionnels lorsque cela devient nécessaire.
"L’objectif de notre campagne est de prendre soin de soi pour mieux prendre soin du monde", indique Ludovic Maugère qui insiste sur l'agir ensemble. "Il y a plusieurs façons d’agir mais l’action collective reste préférable pour sortir du sentiment de solitude et d’impuissance", estime-t-il. Par sa campagne "Tu flippes ?", On est prêt propose ainsi 14 pistes d’action, tant collectives qu’individuelles. "Notre thématique actuelle est l’espoir, cette conviction que demain sera meilleur si on s’en donne les moyens", confie le chargé de campagne dont la volonté est de "prendre soin des personnes capables d’agir".
Ainsi, chacun doit mener des actions à son niveau. Cependant, "le gros de la pollution est structurel", pour Irène Colonna. "Ce sont les groupes pétroliers qui sont à l’origine de la notion d’empreinte carbone pour remettre la faute sur la population", dénonce-t-elle. C’est pourquoi face au manque d’action des États et grandes entreprises, il est nécessaire d’en prendre des petites à son échelle et de lutter pour une économie écologique. Irène Colonna le rappelle : "grâce à la lutte, déjà 24 banques se sont retirées du projet Eacop de Total".
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