"L’espérance ne déçoit pas". C'est le titre du document publié ce mardi 18 janvier par les évêques de France à l’approche de l’élection présidentielle. Un document dans lequel ils ne donnent pas de consigne de vote mais énoncent des points d'attention pour aider au discernement - respect de la vie humaine, fraternité, écologie intégrale... S'il n'y a pas de candidat chrétien idéal pour les évêques, ils incitent fortement les catholiques à aller voter, quitte à voter blanc.
Comme ils en ont l’habitude avant une échéance électorale, la Conférence des évêques de France (CEF) publie un document pour donner des repères et aider au discernement. Dans "L’Espérance ne déçoit pas", les évêques ne donnent pas de consigne de vote mais rappellent les points essentiels de la doctrine sociale de l’Église - sur la dignité humaine, l'écologie intégrale, la fraternité et les relations internationales... "Il y a là beaucoup de points d’alerte sur bien des choix possibles de notre société, précise Mgr Éric de Moulins-Beaufort au micro d’Étienne Pépin, aussi bien par rapport au respect de la vie dans son commencement et dans sa fin, que dans le respect des personnes migrantes."
Au regard de tous ces critères, il n'y a pas de candidat chrétien idéal pour les évêques. "Aucun ne respecte l’intégralité de tous ces points d’attention", affirme le président de la CEF. Les évêques incitent toutefois à aller voter, quitte à voter blanc. "S’abstenir de voter est un manquement à la responsabilité qui incombe à chacun à l’égard de tous", est-il mentionné dans leur texte.
Si certains l’espèrent parmi les catholiques, les évêques ne donneront pas de consigne de vote. "Nous disons délibérément que nous ne donnerons aucune consigne de vote, ce texte n’a pas de portée partisane, nous ne croyons pas qu’il faille cléricaliser les options partisanes des uns et des autres parmi les chrétiens", insiste Mgr Matthieu Rougé, l'un des auteurs du texte.
L'Église catholique ne s’inquiète pas non plus de la tentative de récupération par certains partis politique de l’héritage chrétien de la France. "Ça fait partie classiquement des débats politiques que certains ont la tentation d’instrumentaliser l’appartenance chrétienne", répond Mgr Rougé. Les évêques s’inquiètent cependant de tout ce qui pourrait susciter de la violence dans notre pays. Sans nommer aucun camp politique, ils mettent en garde : "La peur est toujours mauvaise conseillère", écrivent-ils, tandis que l’espérance "ouvre le chemin des choix courageux et salutaires".
Tout au long de leur déclaration les évêques évoquent les sujets non négociables pour l’Église catholique. Ils insistent par exemple sur leur opposition ferme à l’euthanasie, qui serait "totalement contradictoire" avec une "certaine surenchère sanitaire" actuelle. Les évêques s’inquiètent aussi de ce qu’ils appellent les "trucages juridiques ou des manipulations biologiques" autour de la filiation et de la procréation.
Dans ce texte, il est aussi question de la place des religions dans la société française, que les évêques défendent avec vigueur comme une réaction à la loi sur séparatisme. Ils écrivent : "La rencontre des croyants de différentes religions à laquelle concourt la laïcité de notre société française est une chance pour notre avenir social commun."
Sujet de crispation dans la campagne et objet de désaccords entre catholiques, la question migratoire fait partie des sujets d’attention des évêques. Dans leur texte, ils mentionnent les "appels prophétiques" du pape François, et la "légitimité de la régulation juridique des flux". Les évêques de France demandent à "ce que personne ne prenne son parti des drames humanitaires qui se produisent constamment sous nos yeux" et appellent à la créativité sur ce sujet.
Interrogé par Étienne Pépin, Mgr Matthieu Rougé explique : "Ça veut dire qu’entre l’humanité et la responsabilité, il y a un chemin de crête à suivre et que pour suivre ce chemin de crête de manière efficace et féconde aujourd’hui, il faut de la créativité politique : trouver des nouvelles manières de travailler avec les pays d’origine, de comprendre les manières d’accueil, d’intégration… Il ne suffit pas dans ce domaine-là de brandir des slogans quels qu’ils soient."
"Auprès des catholiques militants, il n’y a pas d’attente particulière à l’égard de ce texte", observe le sociologue spécialiste du catholicisme, Yann raison du Cleuziou, maître de conférences en sciences politiques à l’université de Bordeaux. "Je vois que les catholiques très militants sont plutôt attentifs aux évaluations des programmes qui sont produites par des organisations catholiques comme les AFC [Associations familiales catholiques] ou par des organisations proches du catholicisme, comme Alliance Vita ou la fondation Liberté politique."
Le document épiscopal répond selon le sociologue à un enjeu de communication. "Les évêques ont subi beaucoup de crises dernièrement, avec le rapport de la Ciase entre autres. Je pense qu’il est important pour eux de montrer qu’ils se veulent des partenaires de la société, des partenaires d’une construction positive de la société et que c’est important de ne pas communiquer dans l’espace public uniquement lorsqu’il y a une crise qui frappe l’Église catholique."
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