Après deux années perturbées par le Covid-19, Roland-Garros retrouve la foule des grands jours. Avec la fin proche d’un grand chantier et la renégociation des droits audiovisuels, l’un des quatre tournois du Grand Chelem veut rester attractif. Le tennis français en dépend.
Et à la fin, c’est Rafael Nadal qui gagne. L’Espagnol, déjà 13 fois vainqueur du tournoi de Roland-Garros, s’est imposé face au numéro 1 mondial, Novak Djokovic, plus de quatre heures après le coup d’envoi du quart de finale, donné ce mardi 31 mai. Une affiche de rêve, pour cette édition 2022 du tournoi parisien, qui joue gros financièrement, chaque année. "Roland-Garros, c’est un modèle très structurant pour la Fédération française de tennis (FFT), qui perçoit 80% de ses revenus grâce à cet événement qu’elle organise, souligne Christophe Lepetit, responsable des partenariats et des études économiques au Centre de droit et d’économie du sport (CDES). Ces revenus permettent à la FFT d’engager des projets de développement de l’ensemble du tennis, y compris amateur, sur tout le territoire. C’est un modèle quasiment unique dans le sport."
En 2019, Roland-Garros a permis d’engranger un chiffre d’affaires de 260 millions d’euros, sur un budget total annuel de 325 millions d’euros pour la Fédération française de tennis. Mais c’était avant l’arrivée du Covid-19. Avec les restrictions sanitaires, le chiffre d’affaires a plongé à 147 millions d’euros en 2020, 180 millions l’an passé. "Normalement, les entreprises partenaires achètent de l’hospitalité, précise Lionel Maltese, maître de conférences à l’université d’Aix-Marseille, spécialiste en management du sport, ancien membre du comité exécutif de la FFT. Pendant le Covid-19, ces prestations n’ont pas pu se dérouler dans de bonnes conditions. La billetterie a aussi été limitée, tout comme la vente de produits dérivés. Le gros à payer de l’emprunt contracté pour le chantier (notamment la création du court Simonne-Mathieu et la restructuration et le toit du court Philippe-Chatrier) est également arrivé pendant cette période. Par contre, les contrats de partenariat avaient été signés les années précédentes, donc il n’y a pas eu de grosse renégociation."
C’est aussi au cours de la crise sanitaire que les droits audiovisuels ont été renégociés. Avec l’arrivée d’une plateforme privée : les matchs du court Simonne-Mathieu ne sont retransmis que sur Amazon Prime Video, tout comme les nouvelles sessions nocturnes. Pour la Fédération, c’est un moyen d’encaisser davantage de droits audiovisuels domestiques, alors que France Télévisions est accusé de ne pas vouloir donner suffisamment d’argent. Les droits audiovisuels représentent tout de même plus de la moitié du chiffre d’affaires de Roland-Garros, mais en grande partie grâce aux contributions des chaînes étrangères. Les organisateurs ne comptent donc pas uniquement sur cette source de revenus, et veulent diversifier leur offre : billets spéciaux pour les sessions nocturnes, vente de produits dérivés...
Le problème, c’est que Paris doit rester compétitif par rapport aux trois autres tournois du Grand Chelem, qui offrent des dotations aux joueurs de plus en plus importantes. Pour les attirer, les organisateurs de Roland-Garros ont dû augmenter le "prize money" à 43,6 millions d’euros, cette année. Une dotation répartie entre les participants : 62.000 euros au 1e tour, 220.000 pour un 8e de finale, un peu plus de 2 millions d’euros pour les deux vainqueurs. Des sommes qui rémunèrent les joueurs, mais aussi leur équipe. "Les joueurs s’intéressent à la croissance des revenus d’un tournoi car cela augure d’une croissance de la dotation, indique l’économiste du sport, Christophe Lepetit. Cette année, la Fédération française de tennis a privilégié une augmentation pour les joueurs éliminés dans les premiers tours plutôt que pour les vainqueurs, par rapport à la période Covid où les joueurs du bas de la pyramide tennistique ont davantage souffert."
En plus de ce "prize money", les organisateurs de Roland-Garros doivent aussi composer avec les dépenses liées à ce genre d’événement : entretien de la terre battue, transports, hôtellerie ou encore sécurité des joueurs… Des dépenses qui ne devraient pas faire baisser le prix des billets. "En revanche, il peut y avoir des offres sociales pour donner accès au sport, estime Lionel Maltese. Pour le Tour de France, par exemple, les villes paient des milliers d’euros pour que les étapes soient accessibles gratuitement. Quand la FFT travaille avec des partenaires engagés, comme la BNP Paribas ou Engie, qui invitent des personnes n’ayant pas les moyens d’accéder aux matchs, ce sont des actions sociales." La nouvelle directrice de Roland-Garros, Amélie Mauresmo, s’est en tout cas fixée l’objectif de remplir toutes les tribunes. Cette année, le tournoi devrait attirer plus de 600.000 spectateurs.
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