"Je suis tombé d’une table et je me suis fait une coupure à la tête. Mais comme ma voisine était médecin, elle a pu me recoudre !" Plus de peur que de mal pour le petit Thomas, 8 ans. Chutes, brûlures, maux de ventre, fièvre qui grimpe, comment savoir si c’est grave ? Quand aller aux urgences ? Les conseils du Dr Jules Fougère, alias Ped@urg, pédiatre urgentiste au CHU de Rouen et auteur de "Mon Guide anti panique" publié aux éditions Marabout.
CRC. Pour l’urgentiste, ce sont les trois lettres "clés". C comme Comportement. "Est-ce que l’enfant joue comme d’habitude, est souriant ou au contraire est somnolent, fatigué, mou comme une poupée de chiffon. C’est un premier signe d’alerte." R pour respiration. "Un enfant qui respire plus vite que la normale, essoufflé pour parler, qui présente des creux entre les côtes ou dans le cou , il faut aller consulter." Enfin, le troisième C, comme Coloration : "Si l’enfant est très pâle, voir gris, ses lèvres ou extrémités sont bleutées, là, il y a urgence !"
Quoi faire en cas de brûlure ? Main qui touche un plat sortant du four, bougie posée sur une table, mais aussi pieds nus sur plaque métallique ou eau du tuyau d’arrosage rendue bouillante par le soleil, les causes sont multiples. Dans ce cas-là, c’est la règle des 4 X 15 : 15 minutes sous l’eau froide avec une eau fraîche à 15° et à 15 cm au-dessus de la plaie. Et l’appel au 15 si la brûlure est sérieuse, c’est-à-dire en forme de cloque ou noircie au 3e degré. A éviter : le beurre ou la crème fraiche sur la partie touchée. "Des remèdes de grand-mère qui ici , sont une porte ouverte aux infections." rappelle le Dr Fougère.
Comment réagir en cas de chute ? Bébé qui tombe de la table à langer ou enfant qui confond canapé du salon avec un trampoline, le choc peut parfois être rude. "Perte de connaissance, vomissements répétés, somnolence inhabituelle, mouvements anormaux ou propos incohérents, c’est direct la consultation aux urgences." Idem pour un enfant de moins d'un an, "même s’il va bien". Par contre, il n’est pas interdit de faire dormir un enfant dans les heures qui suivent un choc à la tête, à condition qu’il n’y ait eu aucun des signes précédents évoqués.
Maman, j’ai mal au ventre ! C’est le top 3 des symptômes les plus vus aux urgences. Quand faut-il s’inquiéter ? D’abord localiser : si la douleur se situe en bas à gauche, on peut penser à la constipation. Si c’est plutôt à droite, avec une douleur continue et une fièvre à 38-38°C accompagnée de nausées, ça peut être signe d’appendicite et donc consulter très rapidement. Si enfin c’est au-dessus du nombril, des reflux gastrique peuvent en être la cause, surtout si ces maux sont rythmés par les repas. A noter aussi : "Le tube digestif est le deuxième cerveau de l’enfant," rappelle le médecin pédiatre. "Beaucoup de pathologies peuvent donc entrainer des douleurs abdominales, comme les angines ou les otites." Enfin, attention au stress et à l’abus de bonbons !
Il a de la fièvre. Faut-il s’en inquiéter ? D’abord, quand parler de fièvre ? "C'est au-delà de 38°", précise le Dr Fougère. "Mais la fièvre n’est pas une maladie en soi : c’est une réaction normale face à un virus ou une bactérie." Quand est-ce que c’est grave ? Si le bébé a moins de trois mois, si l’enfant boîte et si la température dépasse 5 jours d’affilée avec 38°.
De même si "l’enfant se met à frissonner jusqu’à claquer des dents, a les extrémités bleutées ou présente des marbrures sur le corps, il faut consulter aux urgences." Quoi faire enfin pour soulager ? Bien sûr, du paracétamol pour "rendre la fièvre plus confortable " ou encore dévêtir plus légèrement l’enfant. Par contre, déconseillé : les bains froids, qui ne sont plus recommandés officiellement et peuvent même être source de convulsions.
Consulter aux urgences, oui. Mais pas non plus pour n’importe quoi. Et le Dr Fougère de citer toute une série de motifs saugrenus : "Mon enfant a avalé de l’eau de pluie, il a un bout de cookie sous l’ongle de pied, il a vomi dans son plâtre !" Ou encore "On part demain deux semaines à l’étranger, je voulais être sûr que tout allait bien." Quand ce n’est pas "Je me suis trompé de jumeau !". Des prétextes qui font sourire, mais qui engorgent des services déjà saturés. Et ce n’est pas non plus "Premiers arrivés, premiers servis", rappelle le médecin urgentiste. Les petits patients sont traités en fonction de l’urgence, tout en soulignant cependant qu'il ne faut pas hésiter à "revoir le personnel si l’état de l’enfant s’aggrave en salle d’attente."
Une ambiance aux urgences qui peut être aussi stressante pour un enfant. D’où le parti pris de "rassurer l’enfant avant de le soigner." Comment ? D’abord, en se mettant "accroupi à sa hauteur pour créer une relation de confiance, tout en lui demandant directement dans le box ce qu’il lui arrive." Et puis dans sa blouse, le pédiatre a tout un équipement spécial : des stylos avec des animaux, des tubes de bulles de savon et même un nez rouge ! Et la sortie, sont décernés des "diplômes du courage", que certains anciens patients ont même conservés. "Ça prend dix secondes pour les remplir et quand on travaille en pédiatrie d’urgence, c’est important de garder une âme d’enfant ! ", conclut-il avec un sourire.
Pour aller plus loin :
"Mon guide anti panique : 50 fiches pour savoir quand courir aux urgences pédiatriques" Editions Marabout 2024
Un ouvrage clair et coloré, décrivant le kit des premiers soins, les symptômes courants, les maladies infantiles, les coups et blessures, les maux digestifs et urinaires et les gestes d'urgence.
Le Dr Jules Fougère est aussi à retrouver pour ses conseils et vidéos sur Instagram @ped.urg, compte suivi par 300 000 abonnés
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