Devant la crise écologique ou la pandémie de Covid-19, de plus en plus de personnes souffrent de se sentir coupables. Spécialiste de l'éco-anxiété, la thérapeute Charline Schmerber considère que culpabiliser les individus les infantilise. Au contraire, les responsabiliser leur donne envie d'agir et de trouver eux-mêmes des solutions à la crise.
La culpabilité, "c'est l’une des émotions les plus citées au cours du premier échange que je peux avoir avec les personnes que je reçois", raconte la psychothérapeute. Spécialiste de l’éco-anxiété, l’angoisse générée sur les individus par la crise environnementale, Charline Schmerber "reçoit souvent des gens bourrés de culpabilité". Par exemple, des personnes qui ont du mal à monter dans leur voiture pour aller travailler le matin. Dans ce cas, considère la thérapeute, "le sentiment de culpabilité peut être stérile, malsain et empêcher d’agir". Reste que ce sentiment de culpabilité est "légitime" puisque nous sommes tout autant les victimes que les auteurs de la crise écologique.
Se sentir coupable d’avoir enfreint une loi, transgressé une norme morale ou ses propres ses valeurs, avoir le sentiment d’avoir fait du tort à autrui… Chacun, selon son histoire et sa personnalité peut se sentir coupable. La culpabilité est utile pour le vivre ensemble : "On ne peut pas vraiment imaginer une société sans conscience, sans morale, sans regard sur nos propres comportements. C’est en quelque sorte grâce à la culpabilité qu’on arrive à faire groupe, à vivre ensemble."
Si la culpabilité est utile à la collectivité, elle peut nous paralyser, nous empêcher d'agir. Or, certaines personnes ont tendance à beaucoup trop culpabiliser. On appelle ça "l’effet Dobby", du nom du petit elfe dans la série "Harry Potter". La culpabilité est très en lien avec le surmoi, d’après Freud, qui a pour une fonction de régulation dans notre psychisme. Le surmoi peut être tyrannique, surtout chez les personnes qui ont des idéaux très élevés. Lorsqu’elle les accompagne, Charline Schmerber aide ce type de patients à "confronter leurs idéaux avec la réalité du monde" et "à vivre avec plus de responsabilité plutôt que culpabilité..."
On l’a vu lors de la pandémie, les discours officiels oscillaient parfois entre culpabilisation et responsabilisation. "Le fait de culpabiliser les gens est stérile et empêche d’agir, prévient la thérapeute, alors que les responsabiliser ça permet à la personne de se saisir de quelque chose et d’agir." Dans "Mon privilège, ton oppression" (éd. Marabout), Nathalie Achard écrit : "La responsabilité permet de prendre conscience des impacts de ma présence au monde et d’agir avec détermination et courage."
Ainsi, face aux crises - épidémique, environnementale… - "responsabiliser les personnes, c’est les rendre proactives". Là où la culpabilité peut être "une forme de régression, d’infantilisation", la responsabilisation "ouvre la personne sur le monde" et l’encourage à "rechercher des solutions". "Responsabiliser les gens ça va avoir tendance à les rendre acteurs et à les faire se mettre en mouvement."
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