Tout à côté d’Ennio Morricone et Nino Rota, Armando Trovajoli, disparu il y a 10 ans, était un autre immense compositeur de musiques de films, ceux de l’âge d’or du cinéma italien, des années 50, 60 et 70.
Le Romain disparaissait, il y a 10 ans, le 28 février 2013, à l’âge de 95 ans. Connu pour ses bandes originales tantôt easy listening, tantôt jazzy, mais toujours raffinées et mélodiques, il avait côtoyé le gratin du cinéma italien, d’Alberto Lattuada à Luigi Zampa, en passant par Vittorio De Sica. Mais il est surtout connu pour ses collaborations nombreuses chez deux monstres sacrés que sont Dino Risi et Ettore Scola.
Armando Trovajoli était un compositeur rare, extrêmement brillant et associé à l’âge d’or du grand cinéma italien. En 1959, alors âgé de 42 ans, il écrit sa deuxième partition pour Dino Risi pour Il Vedovo (Le Veuf en français). La deuxième d’une longue collaboration dans le registre de la comédie à l’italienne. Il Vedovo qui met en scène un Alberto Sordi, jeune et alerte, dans la peau d’un arriviste, marié à une riche héritière dont il rêve de se débarrasser pour toucher la fortune. Evidemment, rien ne va se passer comme prévu.
Précurseur du jazz en Italie, Armando Trovajoli aura touché cependant à différents styles dans sa carrière. Sa musique très orchestrée, fait merveille par la richesse de ses arrangements et une inventivité sans limite à l’image du titre Samoa Tamoure, tiré du film à sketches Les Monstres, immense succès en Italie en 1963. Elève, comme Ennio Morricone, du prestigieux conservatoire Sainte-Cécile de Rome, Armando Trovajoli développe très tôt des prédispositions pour la musique. Pianiste de formation, il entre en 1939 dans l'orchestre di Sesto Carlini, une des formations pionnières de jazz italiennes. Pour Les Monstres sacrés, il retrouve Dino Risi qui met en scène sous forme de sketches les stéréotypes et défauts de ses compatriotes. Ugo Tognazzi et Vittorio Gassman s’en donnent à coeur joie et brocardent tour à tour l’armée, la politique, la télévision ou encore le machisme.
Le jazz, c’est avant tout la liberté
Armando Trovajoli
Dans Hier, aujourd’hui et demain, il y a ce délicieux morceau de piano intitulé Descansado, extrait de l’un des sketches de ce film de 1963 que l’on doit au grand Vittorio De Sica avec Sophia Loren et Marcello Mastroianni qui forment un tandem icônique. Il sera couronné en 1965 par l’Oscar du meilleur film étranger. Entre temps, Vittorio De Sica a tourné Mariage à l’italienne, autre master piece, toujours avec Sophia Loren et Marcello Mastroianni.
Armando Trovajoli compose sans relâche et entame en cette année 1964 une première collaboration avec Ettore Scola pour Parlons femmes, première, là encore, d’une longue série.
On peut y entendre ce morceau d’inspiration twist pour Parlons femmes, à nouveau un film à segments, composé de neuf sketchs qui traitent des difficultés des relations entre hommes et femmes. Vittorio Gassman y interprète le personnage central dans chacun. Tantôt cavalier mystérieux faisant escale dans une ferme isolée, tantôt dandy se faisant passer pour un mari modèle, tantôt prisonnier naïf se voyant accorder une permission grâce aux stratagèmes de sa femme… Grand scénariste de la comédie à l’italienne, Ruggero Maccari excelle tandis qu’Armando Trovajoli est devenu un nom qui compte dans le milieu de la musique de film, quinze ans après une incursion remarquée aux côtés de Goffredo Petrassi sur Riz amer.
Autre exemple du style Trovajoli inimitable avec l’une des pièces maîtresses de son répertoire. Nous sommes à nouveau chez Ettore Scola, en 1974 cette fois-ci, et le film s’appelle Nous nous sommes tant aimés… Grande fresque sociale sur l’Italie des Trente Glorieuses à travers le parcours de trois amis aux destins opposés, Nous nous sommes tant aimés est considéré comme un chef d’œuvre du cinéma mondial. Ce film d’Ettore Scola au casting italien d’exception, composé de Vittorio Gassman, Nino Manfredi, Stefano Satta Flores et Stefania Sandrelli, se veut une réflexion sur l’amitié à l’épreuve du temps. Rarement la musique d’Armando Trovajoli a sonné aussi juste au point qu’elle semble constituer un personnage à part entière du film.
Toujours en 1974, décidément une année bénie des dieux, Armando Trovajoli compose le morceau In the dark, extrait de Profumo di donna, Parfum de femme en français, qui vaut à Vittorio Gassman, le prix d’interprétation du festival de Cannes et au film, le César du meilleur film étranger, ainsi que deux nomination aux Oscars. Adapté du roman Il Buio e il miele, de Giovanni Arpino, Parfum de femme, c’est une comédie dramatique vue à travers le personnage de Fausto Consolo, que joue Vittorio Gassman, officier à la retraite, devenu aveugle à la suite d’une explosion. Misanthrope et aigri, il ne supporte aucune contrariété et maltraite Ciccio, son factotum, un jeune soldat qui doit l’accompagner dans un voyage vers Naples. La seule consolation dans la vie de Fausto, c’est de sentir le parfum des femmes et de les imaginer. Il finira par abandonner son cynisme et accepter l’aide et l’amour de Sara, superbement interprétée par Agostina Belli dans son plus beau rôle.
Evoquer Armando Trovajoli sans citer Affreux sales et méchants (Brutti, sporchi e cattivi) serait un oubli majeur. Un autre film essentiel, signé toujours Ettore Scola, en 1976, et un grand succès en Italie mais aussi en France et dans de nombreux pays. Affreux, sales et méchants, porté par Nino Manfredi en patriarche ignoble et libidineux, se veut un portrait au vitriol du sous-prolétariat italien des années 70 qui consacre également Armando Trovajoli et ce qui allait devenir l’un de ses tubes.
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