Il est de ces archéologues qui ont fait et font rêver de nombreuses générations. Indiana Jones est de retour sur les écrans de cinéma ce mercredi 28 juin avec le dernier opus de la saga intitulé "Le Cadran de la destinée". À cette occasion, Thierry Lyonnet reçoit Anne Lehoërff, archéométallurgiste et vice-présidente du Conseil national de la recherche archéologique (Cnra), pour déconstruire les idées reçues sur l’archéologie. Et susciter (pourquoi pas) de nouvelles vocations !
Ne cherchez pas, vous ne trouverez pas beaucoup de points communs entre Indiana Jones et de véritables archéologues. Hormis le chapeau qui est aussi l’accessoire fétiche des archéologues sur les chantiers de fouille. Et même si ce personnage incarné par Harrison Ford agace certains professionnels, Anne Lehoërff, elle, ne s’offusque pas du décalage avec la réalité du métier. "C’est une figure mythique, qui a lui aussi une fascination pour le passé et la folie de vouloir comprendre ce passé vaille que vaille. Oui, il y a plein de trucs faux, mais en même temps moi j’utilise cette figure connue dans mes cours pour emmener les gens ensuite vers l’inconnu et la connaissance", confie-t-elle.
Face à l’engouement que suscite la sortie de ce nouvel opus et compte-tenu du succès rencontré par les expositions portant sur l’archéologie, force est de constater que cette discipline "fascine" le grand public. Pour Anne Lehoërff, auteure du "Dictionnaire amoureux de l’archéologie" (éd. Plon, 2021), cette fascination pour son métier s’explique "parce qu’il relève de la découverte d’un inconnu, d’un intouché, d’un immaculé d’une certaine manière". Et d’ajouter : "Entre l’archéologue et ce qu’il trouve, il n’y a rien eu, on est le premier à y aller, à le retrouver et à le mettre au monde."
"Mettre au monde", voilà la jolie métaphore qu’a choisie Anne Lehoërff pour intituler son dernier livre "Mettre au monde le patrimoine - L'archéologie en actes" (éd. Le Pommier). Si elle est un clin d’œil à l’expression usuelle "mettre au jour", "on peut aller plus loin", explique l’archéométallurgiste. "On redonne vie aux gens à travers ce que l’on sort, ce que l’on exhume, et donc d’une certaine manière on redonne vie." Cela passe par la datation des vestiges, des objets et ossements mais aussi par le sens qui leur est donné au travers de l’utilité qu’ils avaient à leur époque.
Afin de déterminer ces éléments, les archéologues passent une partie de leur temps sur les chantiers de fouilles, mais pas seulement. Le reste de leur temps se partage entre les laboratoires et les salles de classe pour certains. Autant de façons de faire de l’archéologie qui assurent une belle complémentarité entre chaque professionnel. Anne Lehoërff, elle, a également choisi de donner une partie de son temps à la vulgarisation. "Quand j’étais étudiante, le partage et la diffusion avec le grand public, ce n’était pas aussi répandu. Il y avait bien des médiateurs et des gens qui faisaient la promotion dans les années 90, mais le lien entre l’archéologie et la société n’est devenu très important qu’aujourd’hui", constate-t-elle.
Une nouvelle préoccupation qui aidera peut-être à créer les vocations qui vont finir par manquer dans ce domaine. "On voudrait avoir plus de monde c’est clair, car la pyramide fait qu’il y va y avoir des départs à la retraite massifs dans les années à venir", prévient l’historienne. Actuellement plus de 4.500 archéologues sont en fonction en France, parmi lesquels près de 2.000 travaillent pour l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) et 1.000 travaillent pour les collectivités territoriales. Un chiffre faible comparé aux forts besoins en archéologie préventive (c’est-à-dire, les fouilles effectuées en amont des chantiers afin d’exhumer des objets anciens avant que les constructions ne commencent).
L’archéologie peut être un métier d’avenir
Quoiqu’il en soit, la vice-présidente du Conseil national de la recherche archéologique l’assure : "L’archéologie peut être un métier d’avenir" même s’il consiste à étudier le passé. D’autant plus que les progrès des technologies utilisées pour dater et observer les vestiges peuvent réserver de "belles surprises". Et d’insister : "Il faut que ce soit un métier, parce que sur le terrain, si ce ne sont pas des professionnels qui fouillent, c’est du pillage, ce n’est pas de l’archéologie." Avis donc aux curieux et aux patients, désireux de retourner la terre et de redonner vie aux objets du passé !
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