Le coup d’envoi de la 50ème édition du festival d’Angoulême sera donné le 26 janvier. L’occasion de découvrir ou redécouvrir le dessinateur Jean-Marc Rochette. Thierry Lyonnet l’a rencontré dans ses montagnes qu’il chérit tant et qui l’inspirent. Comme dans sa dernière bande-dessinée La Dernière Reine, paru en octobre 2022 aux éditions Casterman.
Certains disent de lui qu’il est un ours. Presque reclus au cœur du massif des Ecrins dans la vallée de l’Oisans. Pourtant, Jean-Marc Rochette c’est surtout un homme poétique qui a fait de sa vie passionnante dans les montagnes, une source inépuisable pour son art. Ses passions pour la nature et la peinture sont apparues tôt dans son enfance. Il se souvient de sa première visite au musée avec sa mère, mais aussi de sa première ascension sur la chaîne de Belledonne. « Cela a été une révélation », raconte-t-il. Son deuxième « choc esthétique » survient aux Bans, à 3300 mètres : « c’était presque mystique. Cette montagne c’était de la lumière pure, une espèce d’appel. »
Un appel qui lui donne envie de devenir alpiniste ou guide de haute montagne. Commencent alors les ascensions en grande cordée avec ses compagnons. Et puis très vite, les premiers accidents et la mort d’un ami « l’arrêtent dans [son] ambition ». Lui-même n’est pas passé loin de la mort. « J’ai failli me tuer dix fois en montagne et j’exagère à peine », dit-il. Il a notamment été défiguré par une pierre un jour. Ses dents, sa mâchoire, tout a dû être reconstruit. Puis il y a eu cet autre accident, plus traumatisant encore lorsqu’il a glissé sur un couloir au bout duquel se trouvait une falaise. Alors que sa mort semblait certaine, lui et son compagnon de cordée ont été arrêtés dans leur chute. « Le mektoub, le hasard » m’ont sauvé, souffle-t-il.
Au cours de ce terrible accident, une révélation lui vient. « Je me suis dit ‘tu ne peux pas mourir, tu as des choses à faire dans le dessin’. C’est curieux parce que je n’étais pas bon en dessin ». Débute alors sa carrière de peintre dessinateur, marquée par un premier succès en 1982 avec la BD futuriste Transperceneige. Mais si elle est saluée par la critique, elle est boudée par les acheteurs et Jean-Marc Rochette vit alors une traversée du désert pendant près de 24 ans. Il vivote. « Il y a eu un moment où j’ai un peu désespéré mais je m’étais fait ce pacte et quand t’es parti, t’es parti. C’est comme en montagne, quand on se lance dans une très grande paroi on ne peut plus redescendre, donc il faut ressortir par le haut », affirme-t-il.
Son salut viendra d’un Coréen, le réalisateur Bong Joon-ho (primé aux Oscars pour son film Parasite). Ce dernier lui propose d’adapter Transperceneige en film. Interprétés par de grands acteurs internationaux, ce film d’action cartonne avec 7 millions d’entrée en Corée. « D’un seul coup ça a éclairé ma carrière, les gens m’ont redécouvert, c’est reparti », sourit-il.
Reboosté, il se lance ensuite dans un récit autobiographique, sur conseil de son éditrice devenue sa compagne. « Pour moi les gens qui écrivaient des livres sur les montagnes c’étaient des gens qui faisaient des exploits. Moi j’étais un grimpeur de très bon niveau comme il y en a beaucoup et puis c’était passé », pense-t-il alors. Avec un co-scénariste qui l’aide à mettre de la distance avec son histoire, Ailefroide Altitude 3954, voit le jour en 2018. « Le succès a été au rendez-vous. A ma grande surprise on est à 100.000 BD vendues, ce qui est énorme pour une BD de montagne et c’est complètement farfelu », s’étonne-t-il encore aujourd’hui, tout en remerciant ses lecteurs et surtout ceux de la montagne qui ont contribué à le faire connaître.
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