Elle est devenue l'une des artistes majeures de l'art contemporain. Les toiles de Fabienne Verdier figurent parmi les plus grandes collections. Depuis son retour en France en 1992, après 10 années d'initiation à la calligraphie en Chine, elle poursuit sa quête de la vibration de la matière et du geste juste. Une grande rétrospective lui est consacrée à Aix-en-Provence du 21 juin au 13 octobre 2019 : "Fabienne Verdier sur les terres de Cézanne". L'occasion de la rencontrer dans son atelier près d'Auvers-sur-Oise, haut lieu de l'impressionnisme.
"En 2014, après tout le travail que j'avais fait autour des maîtres flamands où je m'étais enfermée pendant quatre, cinq ans, j'ai senti le besoin de sortir, de faire un pas vers l'extérieur et d'essayer de vivre des aventures humaines et de voir s'il était temps d'échanger avec l'autre." C'est ainsi qu'en 2014, Fabienne Verdier est partie travailler avec la Juilliard School de New York, et qu'en 2017 elle était à Aix-en-Provence pour le Festival international d'art lyrique.
Ainsi, à l'occasion de la grande rétrospective qui lui est consacrée au musée Granet d'Aix-en-Provence, Fabienne Verdier s'est laissée convaincre par le directeur du musée Bruno Ely d'aller peindre sur le motif, à la façon des impressionnistes, autour de la montagne Sainte-Victoire. "Bruno Ely m'a vraiment mise en confiance et j'ai décidé avec mon époux Ghislain et mon fils Martin d'inventer une sorte d'atelier nomade métallique, raconte l'artiste, et on est partis des semaines durant sur le plateau de Bibémus à caler cet atelier nomade entre les racines de bois, les vieux pins, les rochers." La rétrospective du musée Granet dévoile la façon dont l’artiste s’est "confrontée" à la Sainte Victoire.
Ordinairement et depuis près de 40 ans, Fabienne Verdier, peint dans son atelier à côté d'Auvers-sur-Oise. "Un lieu très important lieu de rencontre quotidien avec la matière." On devrait même dire les ateliers au pluriel puisqu'il existe trois lieux où l'artiste "peut vivre différents rituels au cours du jour".
Celui où elle travaille quatre à cinq heures chaque matin, c'est "la fosse de travail", où de très grands pinceaux sont suspendus au-dessous des toiles posées à l'horizontale sur le sol. En fait, toute l'architecture de cet atelier a été pensée à partir de la pratique artistique de Fabienne Verdier et conçue pour lui permettre de "travailler avec les forces à l'œuvre notamment la gravité". La "fosse" comme elle l'appelle est un lieu "fermé sur l'univers extérieur" pour favoriser "une forme d'introspection". Une sorte d'ermitage, en somme.
Si le projet de sortir et de peindre en extérieur n'a rien d'anodin pour une artiste habituée à être retirée du monde, peindre la Provence et la Sainte-Victoire non plus : Fabienne Verdier se dit "fascinée" par un "territoire chargé de grandes personnalités qui se sont confrontées à la nature et à cette réalité inspirée exacerbée fascinante qu'est la Provence". Cézanne ou Picasso, bien sûr, mais aussi André Masson ou Pierre Tal Coat : tenter de capter, à leur suite mais à sa façon, la "complexité du réel".
Que ce soit les Alpes, les Pyrénées, les rochers des îles de Bréhat et de Groix, les failles rocheuses de l'Ardèche près du Ruoms, "depuis toute petite", Fabienne Verdier est "totalement et tout le temps entourée de minéral". "La minéralité m'a toujours fascinée." Si elle a été initiée à la peinture chinoise, où la montagne tient une place prépondérante, c'est bien "quelque chose d'universel dans le rapport de l'homme à la montagne" que recherche Fabienne Verdier. "J'ai pu me confronter à nouveau à cette réalité-là et cette montagne devient la belle métaphore de la fragilité de cette petite terre sur laquelle nous sommes et qu'il va falloir respecter."
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