Aujourd’hui, direction le Nord, sur cette terre de Flandres qui est, depuis des siècles, un lieu d’élection pour les peintres. Du XVe au XVIIe siècles, de Van Eyck à Rubens, la peinture flamande, a compté autant que la peinture italienne dans l’histoire de l’art. Or cet âge d’or a des héritiers dans la peinture contemporaine, en particulier dans le nord de la France.
L’an dernier, je vous avais parlé d’Eugène Leroy, cet homme qui superposait les couches de couleur au point de rendre presque invisible le sujet qu’il représentait. Aujourd’hui, je voudrais vous parler d’un de ses cadets qui était aussi un de ses amis, Marc Ronet, dont les oeuvres sont actuellement exposées au Musée des beaux-arts de Tourcoing et aussi à la Piscine de Roubaix. Il est peu connu, c’est donc l’occasion de faire une belle découverte.
Marc Ronet est né en 1937 à Marcq-en-Baroeul, non loin de Roubaix et Tourcoing. Dès l’âge de sept ans, il se découvre une vocation d’artiste devant les oeuvres de Jordaens, Rubens et Goya au Musée des Beaux-Arts de Lille. Après des études d’art à Tournai et à Paris, il se lance dans la peinture tout en enseignant le dessin à des élèves du secondaire pendant 35 ans. Il peint énormément avec, dit-il, « un plaisir indescriptible ». Il pratique aussi la gravure qui le passionne car cette technique permet de tirer des épreuves au fur et à mesure du travail pour en conserver les différents états. A Tourcoing, on voit ainsi de grands cadres comprenant parfois douze versions successives de la même plaque.
Ce n’est pas un peintre abstrait. Mais il pratique son art avec un extrême dépouillement ce qui l’amène à frôler l’abstraction. Marc Ronet reprend inlassablement quelques motifs, peu nombreux : une table, un linge suspendu, un chiffon en boule, des tiges de fleur, des bâtons. Ce dernier motif a une résonance particulière dans la vie personnelle de l’artiste. Sa fille Anne-Valérie, lourdement handicapée, doit demeurer allongée. Le bâton devient alors comme une colonne vertébrale pour la vie et l’oeuvre de cet artiste.
Marc Ronet a une manière particulière de travailler qu’il résume ainsi : « Tout lâcher pour tout trouver. » Avec ses outils - la toile, les tubes de couleurs, les pinceaux - il cherche l’énergie de la matière qui entraîne le geste de l’artiste. « Mon geste dit-il, est plus rapide que ma pensée. »
C’est effectivement ce qui est frappant dans le travail de Marc Ronet, ce caractère très physique, cet affrontement à la matière. Il peint souvent avec une sorte de bâton-racloir, sur un panneau posé au sol devant lui. Un panneau de bois car une toile ne résisterait pas à un tel traitement. Il travaille aussi avec un papier très épais qu’il tanne avec des couleurs avant de le griffer pour faire réapparaître le blanc.
La pâte de la peinture est épaisse, mais pas rugueuse comme chez Eugène Leroy. Les couleurs sont profondes, plutôt sombres mais avec des éclats de lumière. Marc Ronet assemble souvent plusieurs panneaux en diptyques ou triptyques. Comme le faisaient les peintres flamands des siècles passés. Cet homme qui peint comme il respire, sans aucune esbroufe, est leur digne héritier.
Au Musée des Beaux-Arts de Tourcoing jusqu’au 11 février, et à la Piscine de Roubaix jusqu’au 7 janvier.
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