Briançon, dans les Hautes-Alpes. La plus haute ville de France, à 1.326 mètres d’altitude, a longtemps abrité des sanatoriums pour accueillir les personnes atteintes de la tuberculose. Albert Camus en fut un des pensionnaires et il en gardait, soit dit en passant, un très mauvais souvenir. De nos jours, on ne soigne plus cette maladie par le bon air de la montagne et les sanatoriums de Briançon ont perdu leur raison d’être, tout comme l’aumônerie qui avait été créée pour les desservir. Plutôt que de garder un bâtiment inutilisé, le diocèse de Gap l’a mis à la disposition d’une association pour créer un lieu de vacances pour des personnes en situation de pauvreté. Cette maison rénovée, réinventée, a été inaugurée vendredi dernier après deux ans de chantier mené par l’association 82-4000 Solidaires.
82-4000 Solidaires, quel nom curieux ! L’explication n’est pas très compliquée. Le massif des Alpes compte 82 sommets de plus de 4.000 mètres d’altitude. Comment faire en sorte que ces lieux magnifiques soient accessibles à tous et pas seulement à ceux qui ont les moyens de s’équiper en matériel et de rémunérer un guide ?
Telle est la question que s’est posé vers 2010 un étonnant personnage dénommé Hugues Chardonnet, à la fois médecin, guide de haute montagne et diacre du diocèse de Gap. Sa réponse a été d’organiser des stages d’alpinisme et d’escalade pour des personnes très éloignées de cet univers en raison de leur exclusion sociale. En lien avec de nombreuses associations, en particulier ATD Quart Monde, et avec le concours de guides professionnels donnant bénévolement de leur temps, des centaines de personnes ont pu accéder à de très hauts sommets et acquérir ainsi une confiance en eux qui a pu les aider à sortir de leur isolement.
Cette maison de Briançon est donc une nouvelle activité pour l’association. L'Écrin 82-4000 - tel est son nom - a été développé dans le même esprit que les stages : offrir le meilleur à ceux qui en sont privés. Souvent, on a tendance à faire pauvre pour les pauvres. L'Écrin est aux antipodes d’un tel esprit. Grâce au travail des architectes, des entreprises et à la contribution des donateurs, les chambres sont belles autant que confortables tout comme les espaces communs.
Un soin tout particulier a été consacré à l’ancienne chapelle, devenue 'espace de silence' pour tenir compte de la diversité spirituelle des personnes hébergées. Baptisé 'Grand Saint-Bernard', c’est ce lieu qui justifie d’évoquer ce projet dans une chronique consacrée aux arts. Les promoteurs du projet ont voulu y accueillir le travail d’un artiste contemporain pour magnifier la vocation de cette grande pièce largement ouverte sur la montagne.
L’artiste retenu se nomme Pierre Mabille. Il a l’expérience de projets à vocation spirituelle, en l’occurrence des vitraux pour deux églises, à Chalonnes-sur-Loire en Anjou, et, tout récemment, à Corbeil-Essonnes, pour Saint-Joseph-des-Tarterêts. Cette fois ce ne sont pas des vitraux mais deux groupes de 12 tableaux de 40cm sur 50cm. Des tableaux abstraits aux couleurs joyeuses qui cohabitent avec la vision de la montagne. Comme le dit joliment Pierre Mabille : 'Ces deux propositions visuelles, d’un côté la danse des formes et couleurs, et de l’autre la majesté naturelle de la montagne, sont aujourd’hui des voisines, j’espère qu’elles deviendront amies.'
Chaque mardi à 8h45, Guillaume Goubert et Simon de Monicault présentent une exposition ou un événement qui raconte l'histoire de l'art.
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