Philippines, Indonésie, Sud Soudan... Depuis une trentaine d'années, Pierre de Vallombreuse parcourt le monde pour photographier les peuples autochtones appelés aussi "peuples premiers". Témoin de la richesse culturelle de ces peuples, il constate aussi les drames qui entraînent peu à peu la disparition de ces populations : guerre, alcoolisme, déforestation. Il a partagé la vie de plus de quarante peuples autochtones et constitué un fond photographique de 150 000 photos.
C'est dans son atelier parisien que Thierry Lyonnet rencontre le photographe Pierre de Vallombreuse. Le lieu est en lui-même un voyage. Entre les tables en bois, les récits de voyages qui trônent sur l'immense bibliothèque mais aussi les souvenirs rapportés de voyage et les portraits de ceux qui ont compté dans sa vie comme Joseph Kessel et Claude Lévi-Strauss, on découvre le travail foisonnant du photographe.
Pierre de Vallombreuse a 58 ans, il est né à Bayonne dans une maison appelé Bagheera, comme la panthère noire de Kipling. "Je n'avais pas lu Le Livre de la jungle encore mais c'était effectivement une prédestination", sourit-il. Le goût du voyage, il le doit à ce livre, qui a bercé son enfance. Et aussi à son père. "Il était le plus jeune parachutiste des forces libres à 15 ans... Après cela il a été chargé de la réinsertion des bagnards à Cayenne sous le gouvernement de De Gaulle, puis il a fondé une banque au Maroc, une compagnie de transports au Brésil", avant de vivre au Laos.
Rapidement, l'aventure est devenue un mode de vie pour Pierre de Vallombreuse. C'est son appareil photo qui lui a permis de continuer à vadrouiller. Et de trouver un métier. Avant d'être photographe, il voulait déjà "imaginer des histoires et les raconter aux gens" avec la bande dessinée et le dessin de presse.
C'est finalement l'histoire méconnue des peuples premiers qu'il raconte depuis plus de 30 ans grâce à la photographie. Lors de sa première année à l'École nationale supérieure des Arts Décoratifs, il a pu partir à Bornéo. Le déclic. "Je me suis retrouvé au pied d'un fleuve, à 4 heures du matin, avec la brume qui s'élève, des oiseaux partout, des montagnes au loin, l'aventure infinie, sans fin et je me suis dit : c'est ça ma vie. J'ai eu une espèce de flash lumineux qui a irradié tout mon corps, ma tête, ma vie était tracée."
C'est aux Philippines que Pierre de Vallombreuse a vécu une expérience qui a changé son existence. Sa rencontre en 1986 avec un peuple vivant dans les cavernes de l'île de Palawan. "C'est là où je suis devenu Mowgli... en passant 4 ans en tout là-bas, j'ai peut-être passé deux ans dans les cavernes, je n'y allais que pour ça" raconte-t-il. Un environnement hostile dans lequel le photographe se sentait pourtant bien. Ce qui l'a attiré chez ce peuple, c'est l'environnement "incroyable", digne d'une autre époque mais aussi la douceur de ses hôtes. "C'est une société douce, anarchique, très drôle, très poétique... qui n'aime pas du tout l'égo."
Quelques années après cette première expérience, le tourisme et le monde extérieur sont venus "polluer" sa vallée tant aimée et le photographe n'a pas le cœur à voir cette destruction en direct. Il s'est tourné vers d'autres peuples premiers. "Je n'ai pas eu le courage de voir la destruction de l'endroit que j'aimais le plus, donc j'ai décidé de dédier ma vie à montrer toutes les misères, les souffrances et les combats que vivent les peuples autochtones en hommage à ma vallée, donc je suis allé voir les génocides du Sud-Soudan, les Dinkas, le problème des amérindiens au Canada..." Plus qu'un art, son appareil photo est devenu une arme politique au nom de tous ces peuples en perdition.
C'est toute cette multiplicité des réponses à la vie sur terre qui m'intéresse. Il faut chérir cette diversité, il n'y a pas une réponse, elle est multiple.
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