LA CHRONIQUE DE GUILLAUME GOUBERT - C'est l'histoire de deux couples. D’un côté, des époux du XVIIe siècle, Marten Soolmans et Oopjen Coppit, des Hollandais comme leur nom l’indique. De l’autre côté, deux pays, la France et les Pays-Bas.
En 1634, Marten et Oopjen ont fait réaliser leurs deux portraits par Rembrandt, un des plus grands artistes de son temps et de toute l’histoire de la peinture.
Quatre siècles plus tard, au milieu des années 2010, la France et les Pays-Bas se sont disputés la propriété de ces deux tableaux pour finalement trouver une solution inédite. Chacun des deux pays a acheté un tableau mais ont pris un engagement solennel, sanctionné par un traité international : les deux œuvres ne seraient jamais séparées. Le couple séjournerait alternativement à Paris et à Amsterdam, au Musée du Louvre et au Rijksmuseum. Après avoir passé cinq ans à Amsterdam, la paire de tableaux vient d’arriver à Paris pour un séjour de même durée. Il faut en profiter pour aller les voir en vrai.
Marten Soolmans et Oopjen Coppit étaient de tout jeunes mariés quand Rembrandt a réalisé ces deux portraits en pied et grandeur nature. Marten avait 21 ans et Oopjen 23. Rembrandt était lui aussi un jeune homme de 28 ans.
Ces toiles sont considérées comme un chef d’œuvre de son début de carrière. Les jeunes mariés appartenaient à la haute bourgeoisie amstellodamoise et Rembrandt a rendu magnifiquement leurs riches habits, vêtements noirs et pièces de dentelle blanche très élaborées. Les deux compositions se répondent : Monsieur tend un gant vers son épouse qui, descendant un escalier, esquisse un mouvement vers lui. Derrière eux, un grand rideau relie les deux toiles.
En 1877, le diptyque avait quitté Amsterdam après avoir été acquis dans une vente aux enchères par la branche française de la famille Rothschild. En 2013, Éric de Rothschild et son frère Robert décident de les vendre et les proposent au Musée du Louvre. Problème, le prix est considérable : 160 millions d’euros alors que le budget annuel d’acquisitions du musée est de 8 millions d’euros. Le ministère de la culture décide alors d’autoriser les Rothschild à vendre les tableaux hors de France.
Le Rijksmuseum saute sur l’occasion et fait savoir qu’il est preneur. Mais, à cette perspective, la partie française se réveille et propose l’idée un achat conjoint des deux pays. Après avoir dit oui, le Rijksmuseum change d’avis et veut le tout. Pour rester dans la course, il faut d’urgence que la France trouve les fonds pour financer sa part. La solution viendra de la Banque de France, providentiel mécène de l’acquisition. Encore faut-il ramener Amsterdam à de meilleures dispositions.
L’affaire trouvera sa conclusion au plus haut niveau. Le président français, François Hollande, profitera d’une rencontre avec le premier ministre néerlandais, Mark Rutte, en marge de l’assemblée générale de l’ONU à New York pour lui tenir ce langage : "Nous sommes tous les deux amateurs de foot. Il ne faut pas que ce match se termine par un 2-0, d’un côté ou de l’autre. Il faut que le score soit un partout." Et ce fut bien résultat final.
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