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Saint-Bruno-les-Chartreux, redécouverte du baroque lyonnais

Un article rédigé par Frère Clément Savary - RCF Lyon, le 8 janvier 2025 - Modifié le 8 janvier 2025

La restauration complète de l’église Saint-Bruno, appelée de leurs vœux par les amateurs d’art depuis les années 1980, vient de s'achever après dix-neuf années de travaux. Joyau patrimonial du plateau de la Croix-Rousse, cette église domine Lyon de son sobre dôme, mais les Lyonnais et les visiteurs ne sont pas si nombreux à monter la voir. Entre stucs, ors, marbres, chênes et peintures, c’est toute la mémoire d’une vie monastique oubliée que le visiteur peut redécouvrir.

Eglise Saint-Bruno-les-Chartreux © Ville de LyonEglise Saint-Bruno-les-Chartreux © Ville de Lyon

Au cœur d’un édifice aux lignes sobres et à la blancheur retrouvée s’élève un baldaquin de 18 mètres de haut dont les stucs dorés et les marbres polychromes frappent le visiteur dès son entrée. Ses quatre fines colonnes de marbre suisse soutiennent une imposante structure de bois doré, évoquant à la fois un dais textile surplombant un trône et une couronne descendant du ciel.

Les supports sont traités à l’antique, évoquant la sobre et solide majesté de l’architecture, tandis que les parties hautes s’élancent dans un jeu de courbes et contre-courbes mêlant végétaux, coquilles, nuages et angelots dont la gracieuse légèreté est caractéristique du style rocaille. Achevé en 1737, ce chef-d’œuvre fut dessiné par Jean-Nicolas Servandoni, un peintre et architecte franco-italien alors très apprécié à Paris. D’abord décorateur de théâtre, il employa du papier-mâché pour ne pas surcharger les sculptures hautes et fit le choix original d’utiliser de véritables draps de lin imprégnés de plâtre pour former ces draperies.

Baldaquin du maître-autel de l'église St Bruno-les-Chartreux de Lyon © PucesurvitamineeBaldaquin du maître-autel de l'église St Bruno-les-Chartreux de Lyon © Pucesurvitaminee

Malgré sa splendeur le baldaquin n’existe pas pour lui-même, il conduit le regard sur l’autel qu’il abrite. Le dôme qui le surplombe apporte une lumière généreuse qui illumine le sanctuaire, le distinguant de la nef plus faiblement éclairée. Placé à la croisée des bras du transept, du chœur et de la nef, l’ensemble met en évidence le cœur de la croix que forme le bâtiment et polarise l’espace autour du lieu de la
célébration eucharistique.

Du dôme aux volées de marches, tous ces éléments architecturaux forment une série de cercles concentriques qui se resserrent progressivement autour du sanctuaire. Cette dynamique architecturale pleinement baroque souligne la centralité de l’autel comme espace de célébration de la messe et de conservation du Saint-Sacrement dans le tabernacle, éléments au cœur des prières de la communauté qui fit construire cette église.

Vitamine C autour de LyonRestaurer l'église Saint-Bruno-lès-Chartreux, joyau baroque lyonnais

Le grand chantier de restauration de l’église Saint-Bruno, inauguré en 2016 par la dépose de l’orgue, a pu être mené à bien grâce à un important effort financier. Ces 2,5 millions d’euros furent réunis pour moitié par la mairie, propriétaire, et par les apports de l’État et de mécènes passés par l’entremise de la Fondation Saint-Irénée du diocèse de Lyon. Grâce à ce grand nettoyage, le monument se révèle dans toute sa splendeur.

Un monastère oublié

Aujourd’hui nom d’un groupe scolaire réputé, les chartreux sont d’abord des religieux contemplatifs fondés en 1084 par saint Bruno dans un vallon du massif de la grande chartreuse. Voulant imiter les premiers ermites de l’antiquité chrétienne, ils vivaient dans le silence et la solitude.

Recherchant ordinairement des sites isolés, leur implantation au milieu du quartier des canuts peut paraître paradoxale. Il faut se rappeler qu’avec ses pentes raides, la Croix-Rousse fut d’abord une zone viticole qui accueillit à partir du XVIe siècle de nombreuses communautés religieuses. En quelques décennies, une petite équipe de moines élevèrent tous les bâtiments nécessaires à leur vie de solitaires : l’église, les espaces communs et surtout le grand cloître. Ses quatre galeries de 80m de côté desservaient vingt-quatre « cellules », petites maisons de quelques pièces où chaque chartreux est plongé dans la contemplation silencieuse au milieu de son quotidien fait de prières, de lectures et de travail manuel.

La Révolution française mit fin à cette vie monastique. De nombreux couvents furent détruits, ne laissant que des noms de rues pour seule trace. L’enclos des chartreux fut morcelé et vendu, mais de nombreux vestiges demeurent. Dans la nef de l’église devenue paroissiale se trouvent encore plusieurs statues et peintures commandées par la communauté et représentant des saints de l’ordre, réalisés par des grands noms de l’art français comme le sculpteur Jacques Sarazin. C’est surtout derrière le baldaquin que le visiteur peut retrouver leur souvenir.

Dans le chœur s’alignent encore les quarante-six stalles où prenaient place les moines pour les prières communes. Au centre de ce vaste espace se tient encore le lutrin du XVIIIe siècle. Ce pupitre sculpté supportait les livres de chants et de lectures destinés à la récitation des vêpres et de l’office de nuit. Les vêpres grégoriennes chantées par les paroissiens le jeudi soir sont une occasion de retrouver un peu de cette majestueuse louange monastique.

L’église n’est cependant pas la seule partie subsistante de l’ancienne chartreuse. À l’ombre de son flanc ouest est conservé intact le petit cloître, un simple jardin de fleur encadré de larges galeries blanches pavées de grandes dalles polies par des siècles de passage. La pâle lumière et le silence imperturbable qui y règnent nous replongent dans l’atmosphère de recueillement des chartreux. Ce cloître et la salle capitulaire voisine peuvent être découverts lors de visites guidées par l’association Église Saint-Bruno Splendeur du Baroque.

 

Visite de l'Ă©glise possible du lundi au samedi de 15h Ă  17h, sauf jours fĂ©riĂ©s.

 

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