Faut-il cesser de manger du bœuf pour sauver la planète ? L’élevage bovin représente près de 9 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre liées à l’activité humaine. Sans aller jusque-là, il est possible de diminuer l’empreinte carbone de la viande de bœuf en changeant de pratiques d’élevage.
C’est ce que démontre le programme de recherche européen Life beef carbon. De 2016 à 2020, il a suivi 170 fermes pilotes, en France, en Irlande, en Italie et en Espagne. Parmi elles, quatre élevages de Maine-et-Loire, dont la ferme des Blottières, à Chemillé-en-Anjou.
Ancien banquier reconverti dans l’agriculture, Benoît Huntzinger a repris cette ferme en 2018. « Elle est en bio depuis plus de 30 ans, et mes prédécesseurs ont fait un gros travail pour replanter des haies, salue-t-il. Il y en a plus aujourd’hui qu’avant le remembrement dans les années 50. »
Il élève 50 vaches sur 75 hectares, une taille qui lui permet de nourrir ses vaches de manière quasiment autonome. « Le but, c’est de baser l’alimentation du troupeau principalement sur l’herbe, c’est-à-dire le pâturage et la production de foin », explique-t-il.
« On produit aussi les céréales qui vont permettre d’engraisser les animaux, ajoute-t-il. Le but, c’est d’acheter le moins possible d’aliments à l’extérieur. » Ici, pas de soja importé d’Amérique du Sud, ce qui permet de réduire les émissions de CO2 liées au transport.
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Pour que les vaches puissent continuer de brouter l’été, l’éleveur a dû semer de nouvelles herbes plus résistantes à la sécheresse dans ses prairies, comme le sorgho, une herbe africaine. Il teste actuellement un mélange de plantain, de chicorée et de luzerne.
Pour réduire son empreinte carbone, l’agriculteur a également changé de véhicules. « Avec des tracteurs moins puissants, on a réussi à diminuer la consommation de carburants de 30 % sur la ferme », se félicite Benoît Huntzinger.
« Quand on a besoin d’un tracteur puissant, c’est le cas pour certains chantiers, on va prendre celui de la Cuma (coopérative d’utilisation de matériel agricole, NDLR), mais ce n’est que quelques jours par an », relativise l’éleveur.
Non seulement sa ferme émet moins de CO2, mais elle en stocke plus grâce à sa structure en bocage, faite de prairies bordées de haies. « On a 90 % de la surface de la ferme qui est en prairies, permanentes ou de long terme, qui sont de véritables puits de carbone, souligne-t-il, ainsi que des haies qu’on continue à développer. »
« Avec ses 65 hectares de prairies et ses 15 kilomètres de haie, la ferme des Blottières absorbe 195 tonnes de CO2 par an, soit 40 % du carbone qu’elle émet », constate Christophe Grosbois, chargé de mission viande bovine à la Chambre régionale d’agriculture.
« Il nous manquait quelques mares, qui sont aussi des puits de carbone, en plus d’être des réserves de biodiversité, note Benoît Huntzinger. Donc on devrait bientôt commencer à creuser un chapelet de mares. »
Ce modèle moins polluant est aussi plus rentable. « Comme disait mon grand-père, on est riche de ce qu’on gagne mais aussi de ce qu’on ne dépense pas, lance-t-il dans un sourire. Avec beaucoup moins de charges, de carburant mais aussi d’alimentation, on optimise la rentabilité de la ferme. »
D’autant que la ferme des Blottières écoule sa viande bio essentiellement en vente directe, ce qui permet d’en tirer un meilleur prix, puisqu’il n’y a pas d’intermédiaires.
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