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Des signes de la Résurrection du Christ dans une France en crise

Un article rédigé par Stéphanie Gallet, Melchior Gormand, Odile Riffaud - RCF, le 5 avril 2023 - Modifié le 9 avril 2023
Je pense donc j'agisDes signes de la Résurrection du Christ dans une France en crise

Peut-on vivre l’espérance de Pâques en France en 2023 et rester lucide sur la gravité des événements qui secouent notre pays ? Réforme des retraites, inflation, fins de mois difficiles... Quel rapport avec la fête de la résurrection du Christ ? RCF vous propose d'entendre la voix des chrétiens engagés sur le terrain, ceux qui pensent qu'il faut "redoubler d'espérance quand on dit que tout est foutu".

Manifestation contre la réforme des retraites à Paris le 23/03/2023 ©Benjamin Guillot-Moueix / Hans LucasManifestation contre la réforme des retraites à Paris le 23/03/2023 ©Benjamin Guillot-Moueix / Hans Lucas

Cela fait plusieurs semaines que les chocolats de Pâques sont arrivés dans les supermarchés. Une profusion qui contraste avec les différentes pénuries d'il y a encore quelques mois. Le projet de réforme des retraites attise un climat social tendu. En cette Semaine sainte, pour ne pas tomber dans le "tout est foutu", et si on écoutait la voix des chrétiens ? De ces hommes et de ces femmes engagées sur le terrain qui réussissent à y trouver les signes de la Résurrection ? 

 

Les personnes de la rue portent "le visage tuméfié du Christ"

 

On a beaucoup parlé ces derniers temps des violences urbaines lors des manifestations contre la réforme des retraites. On a tendance à l’oublier mais à quelques mètres des affrontements, il y a toujours une personne assise sur le trottoir, quelle que soit la situation économique et l’intensité des troubles. Pascal Bourgne le rappelle, "les chiffres à Paris sont hallucinants ! On a plus de 3.000 personnes qui dorment tous les jours chaque nuit dans la rue, on a 400 personnes qui meurent tous les ans dans la rue". Président de la délégation parisienne du Secours catholique, il voit beaucoup de "gens abimés, cabossés par la vie". Des personnes qui, elles le disent elles-mêmes, sont considérées comme "du mobilier urbain", rapporte Pascal Bourgne. "Ça veut dire qu’on ne les voit plus, on s’habitue... "

 

Ces personnes, pour leur parler et les regarder dans les yeux, il faut se baisser, s’accroupir. "Dès qu’on rentre dans ce dialogue, témoigne Pascal Bourgne, dans cette intimité, dans cette proximité, on rentre dans la Pâque. Parce que cette personne a quelque chose à nous dire de Dieu." Au Secours catholique, les équipes se focalisent sur l’accompagnement. Car "à Paris, on ne meurt pas de faim, on meurt de solitude". Des hommes et des femmes qui ont "le visage tuméfié du Christ" et pour qui il faut des semaines parfois des années d’accompagnement pour qu’elles "ressuscitent".

 

Désespérer de la crise ou espérer un changement de modèle

 

La pauvreté ne concerne pas tout le monde. "Quand on est du bon côté, il y a des gens pour qui la vie va encore très, très bien, précise Philippe Royer, et le problème c’est qu’elle va très, très mal pour d’autres." Le problème, c’est donc le modèle. "On voit bien qu’il faut changer de modèle", estime l’ex-président des Entrepreneurs et dirigeants chrétiens (EDC).

 

Gilets jaunes, guerre en Ukraine, confinement, réforme des retraites, Sainte-Soline… "Toutes ces crises sont liées et posent la question du modèle de société qu’on recherche", estime Benoît Halgand. Membre du pôle Formation du Campus de la Transition, il est le signataire de la tribune publiée dans La Croix : "Jeune polytechnicien, je ne souhaite pas être un pion utile de ce système" (en août 2022). "Est-ce qu’on continue notre modèle néo-libéral qui pèse sur les plus fragiles et sur l’environnement, sur les écosystèmes, sur le climat ? Ou est-ce qu’on essaie d’inventer autre chose ? Le passage d’un modèle à l’autre crée des tensions..."

 

 

→ À LIRE : Édito de Patrice de Plunkett - Mégabassines de Sainte-Soline : pourquoi ils s'y opposent

 

 

Plutôt qu’une "situation de crise", Philippe Royer considère que nous visons une "mutation profonde, dans laquelle il nous faut inventer un nouveau modèle". "Il nous faut quitter cet individu qu’on est devenu dans une société d’hyper consommation pour redevenir une personne alignée, une personne cohérente, une personne qui va être actrice de réconciliation." Co-auteur du livre "S’engager pour le bien commun" (éd. L’Emmanuel, 2021), Philippe Royer vient de prendre la responsabilité de Fratello. "Le problème de fond, dit-il, c’est qu’on voudrait que le monde change mais on voudrait que ce soit les autres qui changent. Le monde ne changera que si on change là où on est nous, chacun…. Le chrétien pour moi c’est celui qui pense tout n’est pas foutu et qu’on peut changer les choses là où on est."

 

 

On doit redoubler de foi et d’espérance quand tout le monde pense que tout est foutu

 

 

Climat social : comment sortir du "tout est foutu" ?

 

Syndicats et gouvernement, riches et pauvres, monde rural et monde urbain… Les lignes de fractures semblent se dessiner de plus en plus dans notre pays. "Je crois que le Christ était dans les lieux de fracture de l’humanité, considère Benoît Halgand, nous on est appelés, en tant que chrétiens, à être dans ces lieux de fracture, à être dans ces mobilisation syndicales, à être auprès des personnes qui souffrent et à s’engager."

 

Et si la situation fait peur et s’il y a des raisons de s’inquiéter, on peut aussi considérer "tous ces gens qui s’engagent, qui le font dans un climat le plus souvent de joie, de fête, de rencontre", suggère Benoît Halgand. "Je pense que c’est quelque chose qui va définir le monde pour lequel on s’engage : de mettre la relation à bord." Philippe Royer abonde : s’engager, être en lien plutôt que dire "tout est foutu". "Un point extrêmement important c’est qu’un chrétien ne peut pas tomber dans le populisme du tout est foutu, cela voudrait dire qu’il n’aurait plus la foi."

 

Et si on ne les entendait pas assez, ces chrétiens qui s’engagent sur le terrain ? "Le bien ne fait pas de bruit", avance Philippe Royer… Au Secours catholique, 50.000 bénévoles "se lèvent tous les matins pour servir", souligne Pascal Bourgne : "Là, on voit les germes de la Pâque, de la résurrection !" Et comme le rappelle Gwenaël Boulet, pasteure de l’Église protestante unie de France, "si les personnes étaient résignées, elles ne seraient pas à manifester, à écrire des tribunes, à aller vers l’autre pour partager, pour avoir un discours qui encourage. Je crois qu’il y a de l’espérance dans ce que l’on est en train de vivre."

 

On n’a pas tous la foi et l’espérance chevillées au corps. Parfois nos certitudes vacillent et on a du mal à voir les signes de la résurrection dans nos vies. Mais "l’espérance c’est ce qui reste quand plus personne n’a d’espoir", prévient Philippe Royer, qui invite les chrétiens à être des acteurs plus que des observateurs. "Il revient au chrétien d’être présent dans ces moments-là. On doit redoubler de foi et d’espérance quand tout le monde pense que tout est foutu, on doit être cette lumière du monde et je pense qu’il faut le faire concrètement."

 

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