Les discussions autour de la question animale sont loin d’être nouvelles : le sujet agitait déjà les philosophes de l’Antiquité et n’a pas cessé depuis de nous interroger. Plus récemment, l’intensification des débats autour de la cause animale pousse à reconsidérer encore les relations entre les humains et les autres animaux. Interdiction progressive des animaux sauvages dans les cirques et delphinariums, reconnaissance de leur statut d’être sensible, fin de l’expérimentation animale pour l’industrie cosmétique… Le développement du champ de recherche interdisciplinaire des études animales a également ouvert de nouvelles perspectives sur des attitudes et systèmes comme l’anthropocentrisme et le spécisme. Alors, comment pourrions-nous appréhender aujourd’hui autrement notre place au sein du monde animal ?
Regards croisés de
Violette POUILLARD → Chargée de recherche CNRS, Laboratoire de Recherche Historique Rhône-Alpes, Professeure invitée à l’Université de Gand (Belgique)
Sarah ZANAZ → Doctorante en philosophie morale (éthique animale), École doctorale des Sciences de la vie et de la santé de l’Université de Strasbourg, en co-tutelle internationale de thèse avec l’Universidad Autonoma de Puebla (Mexique)
Une rencontre organisée en partenariat avec le Musée Zoologique de Strasbourg.
Il n’est pas une seule semaine sans qu’on entende parler dans les actualités des relations entre
les humains et les animaux. On dirait que notre société est quelque peu "écartelée" entre l’amour des animaux et la violence avec laquelle on les traite dans de nombreuses situations. C’est donc bien le moment de se poser et de réfléchir à la place de l’animal humain au milieu des
autres animaux non-humains.
La protection des animaux est une préoccupation ancienne (Pythagore). Au 19e siècle, la présence des animaux en ville va entraîner le développement des oppositions envers la cruauté, la création des associations de protection et le vote des premières lois de protection
Mais cette mise à l’écart des violences animales de l’espace public et la standardisation de la mort animale dans des espaces fermés nourrissent l’industrialisation de l’élevage, spécialement après
la Seconde Guerre mondiale.
Comme le racisme, ou le sexisme, le spécisme est une discrimination. Pas fondé sur la "race" ou
sur le genre, mais plutôt sur l’appartenance d’espèce.
Les spécistes privilégient systématiquement les humains par rapport aux animaux. La souffrance
des humains importe plus que la souffrance des autres animaux. Si ces pratiques avaient pour victimes des êtres humains nous trouverions cela inacceptable. Mais comme ils ne sont "que des
animaux" nous acceptons qu’ils soient traités de cette manière.
On pourrait dire : "Nous ne les traitons pas ainsi parce qu’ils sont d’une espèce différente, mais
parce qu’il leur manque des capacités mentales". Mais alors que dit-on des humains "différents" (nourrissons, handicapés mentaux, personnes séniles, etc.) ?
C’est donc bien l’appartenance à une espèce (donc le spécisme) qui est en jeu.
Parce que l’appartenance à l’espèce est purement biologique, donc arbitraire, et non pertinente
moralement.
Qu’est-ce qui est pertinent moralement ? Notion de sentience définie par la capacité à ressentir
des choses (sensations + émotions) agréables ou désagréables, positives ou négatives.
Est-ce que tous les animaux sont sentients ?
De façon générale, tous les vertébrés sont sentients : mammifères, oiseaux, poissons, reptiles,
batraciens, mais aussi certains invertébrés comme les céphalopodes. Des doutes subsistent quant
aux insectes.
La question est de pouvoir réconcilier la protection des animaux et la justice sociale, la protection
des environnements et la justice environnementale.
Quelles pistes de cohabitation entre humains et animaux ?
On peut militer pour l’antispécisme, on peut changer ce qu’on met dans notre assiette, on peut
considérer les animaux comme des êtres à part entière en les accueillant dans des "sanctuaires"
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