Florent de Bodman - La crèche, le meilleur levier contre les inégalités
En partenariat avec 1001mots
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Les parents sont souvent demandeurs de conseils. J’ai banni de mon vocabulaire professionnel le mot : conseil. Car qui suis-je pour dire aux parents que faire avec leur enfant ?
Évidemment, je sais beaucoup de choses que je peux partager avec les parents, je suis une experte, je sais comment l’enfant grandit ce dont il a besoin. Mon savoir s’est construit au fil des années par la théorie et surtout par l’expérience auprès des tout-petits et leurs parents. Je m’appuie beaucoup sur les travaux de Winnicott, de Bowlby et d’Emi Pikler (il faudra qu’un jour, je fasse une chronique sur cette grande dame, pédiatre hongroise, trop méconnue) et bien sûr sur les nouveaux savoirs avec les neurosciences.
Mais sur beaucoup de sujets, les conseils ne servent à rien. Je ne connais pas cet enfant aussi bien que son parent. Je ne sais pas l’histoire de cet enfant et de ce parent. De ce qui peut se jouer dans cette famille.
Le professionnel peut culpabiliser le parent souvent sans le vouloir en donnant ces fameux conseils. Quand nous sommes parents, on grandit avec son enfant, cet enfant-là. Nous faisons avec nos émotions et nos contradictions et quand on lit, on peut être désappointé pour appliquer ce qui est écrit, entre guillemet "ce qui serait bon" pour notre enfant.
Lors d’une soirée thématique que j’anime avec une diététicienne, nous présentons ce qu’est l’équilibre alimentaire du jeune enfant. Les échanges portent à un moment sur un enfant qui refuse de manger. Nous nous voulons rassurantes en disant ce n’est pas grave si l’enfant ne mange rien à un repas, qu’un enfant ne se laisse pas mourir de faim.
À ce moment-là, un parent nous dit qu’il est impossible pour lui que son enfant sorte de table sans manger. Il sait bien que Théo ne goûtera pas aux haricots verts puisque s’il refuse, il aura des pâtes. "Mais je ne peux pas faire autrement", nous dit le parent. Si j’avais insisté sur la nécessité de l’équilibre alimentaire, qu’aurait ressenti ce parent ? Aurait-il arrêté de faire des pâtes ? Non. Je pense plutôt mes réponses comme de petites graines que je plante, le parent s’en saisira à un moment.
Quand un parent demande conseil, je pose toujours la même question : et vous, vous avez pensé à quoi ? Car le parent y a réfléchi, a tenté des choses. Puis, on déroule ensemble ce qui est envisageable pour le parent. Je partage avec lui mes connaissances et mes expériences. J’aime bien quand j’échange avec le parent en présence de l’enfant, car non seulement il entend, mais comprend aussi ce qui peut inquiéter son parent. Je l’associe aussi à l’échange et ce quel que soit son âge. Papa, maman me disent que tu ne veux pas dormir, nous sommes en train d’en discuter pour que tu puisses y arriver.
C’est amusant de lire les écrits de puériculture à différentes périodes, on voit bien que les conseils évoluent. La vérité change donc avec le temps ? Je dis souvent que s’il y avait un mode d’emploi pour s’occuper de son enfant, j’aurai écrit un livre de recettes et serai loin d’ici à profiter de mes appointements.
Nathalie Encinas est puéricultrice, elle dirige un service petite enfance dans l’Essonne. Elle est l'administratrice de l’association 1001mots.
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