L'emploi saisonnier, destiné à répondre à un accroissement local et temporaire de l’activité économique, représentait plus de 4 millions de postes en 2017 selon une étude de l'INSEE. Un statut de mieux en mieux protégé mais qui souffre encore de nombreux abus. Une émission Je pense donc j'agis présentée par Melchior Gormand.
Contrairement aux idées reçues, le travail saisonnier n’est pas dégradant dans son concept. Il s’agit d’un emploi prenant place durant une certaine période de l’année et justifiant l’emploi temporaire d’une main d'œuvre plus ou moins importante.
Entre autres, créer des emplois saisonniers permet d’offrir des possibilités d’emplois à ceux qui ne peuvent travailler que durant certaines périodes de l’année, comme les étudiants, ou encore éviter de licencier des salariés en période de baisse d’activité.
Nicolas Savary, directeur de l’ANEFA - Association Nationale pour l’Emploi et la Formation en Agriculture - considère l’existence de ces emplois d’un très bon œil, grâce aux portes qu’ils ouvrent. "Être saisonnier dans l’agriculture permet de ne pas être attaché à une entreprise, alors que le CDI est de moins en moins prisé par la jeune génération. Cependant, ceux que ça intéresse voient également cet emploi comme un tremplin vers le monde de l’agriculture".
Ces emplois se retrouvent principalement dans les secteurs de l’agriculture et de l'hôtellerie restauration, bien que le marché du bâtiment embauche de nombreux saisonniers. Généralement, les horaires de ces activités peuvent être changeants et hasardeux en suivant divers facteurs échappant au contrôle du travailleur. Cela entraîne, bien entendu, de nombreux abus.
Heures supplémentaires non comptabilisées, droits bafoués, description mensongère du travail attendu... la liste d’abus relevés chaque année par les agences de l’emploi ne cesse de s’allonger. Stéphanie Dayan, secrétaire nationale de la CFDT Services, reconnaît que les employeurs ne respectent pas toujours la réglementation : "Le métier de saisonnier est encadré par un contrat utilisé pour tout ce qui touche à l'hôtellerie, même s’il est très rarement respecté. On est dans un secteur où les salariés ne connaissent pas spécialement leurs droits ou ont des arrangements avec les patrons pour travailler au gris". Tout cela contribue à donner la mauvaise réputation actuelle du marché de l’emploi saisonnier, aboutissant à une pénurie de main d'œuvre dans de nombreux secteurs.
Après avoir vécu le contrecoup du travail au gris, ils n’ont plus peur d’aller chercher ailleurs.
Marion Olivier, responsable de la Maison du travail saisonnier de Lourdes et ses vallées, pense qu’il s’agit d’un phénomène accéléré par la crise du Covid, où beaucoup de saisonniers ont commencé à se renseigner sur les alternatives de leur travail. "Ils ont pu utiliser la crise pour se former à d’autres secteurs et savent désormais se réorienter. Après avoir vécu le contrecoup du travail au gris, ils n’ont plus peur d’aller chercher ailleurs", souligne-t-elle. Pour lutter contre la pénurie de main d'œuvre, certains employeurs n’hésitent pas à embaucher des étrangers tandis que d’autres cherchent à redorer le blason de la profession.
Les perspectives d’avenir sont peu nombreuses dans la profession de saisonnier. Marion Olivier reconnaît que le travail, de nature épuisante, devient difficile à exercer passé la trentaine. Pour contrebalancer ce désagrément, les organisations chargées d’encadrer le travail tentent d’apporter de l’attractivité à l’emploi. Aux yeux de Stéphanie Dayan, ce changement était tout autant nécessaire pour les employés que les employeurs : "Beaucoup d’associations essaient de permettre un meilleur accès au droit pour apporter une vraie solidité au travail de saisonniers. Aujourd’hui, la donne a changé. C’est plus les employeurs qui courent après les saisonniers que l’inverse".
On est dans un secteur où les salariés ne connaissent pas spécialement leurs droits.
Vient également l’accompagnement des saisonniers dits "fragiles". Bien que cet accompagnement soit peu employé proportionnellement à ceux qui en ont vraiment besoin, il demeure un outil attractif d’une aide précieuse dans le contexte actuel. L’ultime défi de la profession est certainement de faire cesser son aspect "subi". Certaines personnes souhaitent réellement exercer ce métier en accord avec leurs choix de vie mais, pour l’heure, il est nécessaire de faire évoluer les contrats et les conditions de travail pour permettre leur d’envisager un avenir.
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
Intervenez en direct au 04 72 38 20 23, dans le groupe Facebook Je pense donc j'agis ou écrivez à direct@rcf.fr
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