Débattre pendant les Fêtes, sans se prendre la tête, par Marie-Hélène Lafage

On pourrait commencer par des débats sur le sapin lui-même ! Pour plein de raisons, Noël est l’occasion de discussions animées – voire de tensions – sur nos choix en matière d’écologie : quelles décorations ? quel menu pour nos repas de fête ? quels cadeaux ? quels choix de transport ? On touche alors aux choix de consommation et au mode de vie de chacun.

Des tensions exacerbées à Noël

Ce qui est important à comprendre, c’est que ces débats sont exacerbés à Noël, pour plusieurs raisons : d’abord l’ancrage dans des traditions souvent héritées de l’enfance, et qui nous tiennent à cœur ; ensuite le fait de se retrouver dans des temps partagés, qui impliquent des choix collectifs – alors qu’on fait d’habitude des choix individuels ; et puis le côté retrouvailles en famille qui mêle beaucoup d’affect, avec des personnes dont on est plus ou moins proches, qui ont pu évoluer différemment de nous dans leur parcours de vie. Bien sûr, les débats houleux en famille ne se cantonnent pas à l’écologie, mais elle constitue souvent un sujet de dispute.

Il faut accepter que l’écologie puisse provoquer des débats. On rêve trop souvent d’un consensus lisse, alors que le débat est légitime. De manière générale, on a peur de la conflictualité, de laisser s’exprimer les désaccords. Or, pour nous chrétiens, cela peut faire écho aux paroles du Christ dans l’évangile de Matthieu : "Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive en ce monde." Suivre le Christ, faire des choix personnels en conscience, ça bouscule, ça demande souvent de trancher, de se positionner. Le Christ, c’est la Paix venue dans le monde, mais je pense que ce n’est pas une paix factice, où on mettrait tout sous le tapis. C’est aussi très utile de réfléchir sur notre rapport aux traditions, que l’on a parfois tendance à sacraliser. Si cette année on se passe de foie gras, par exemple, est-ce que c’est si grave ? Les traditions elles-mêmes ont vu le jour à un moment donné, et ont beaucoup évolué au fil du temps. On peut se dire, comme Jean Jaurès, "de la tradition, gardons la flamme et non la cendre."

Se mettre en posture d'écoute

Je pense que Noël est une belle occasion pour se mettre en posture d’écoute. Accueillir le point de vue de l’autre, c’est lui faire une place, en apprendre sur ses choix de vie, les questions qui le traversent. Nombre de discussions sont chargées de tensions, car nous n’avons plus les clés pour nous comprendre. Nous nous voyons pour de rares moments en famille, sans passer beaucoup de temps ensemble par ailleurs, alors que c’est crucial pour nourrir la compréhension mutuelle.

Profitons donc de ces fêtes pour nous poser des questions, pour mieux nous comprendre, plutôt que de réagir à chaud. Dans l’esprit de Noël, on peut se dire que faire des concessions, faire autrement, c’est aussi reconnaître que les autres ont quelque chose à nous apporter, accueillir l’autre. Enfin, au-delà de nos choix individuels, l’écologie peut aussi nous permettre de vivre des temps collectifs et positifs : préparer ensemble une nouvelle recette, fabriquer de la décoration, faire des projets au-delà du "matériel"… C’est bien à cette joie que nous invite le Pape François dans la conversion écologique.