LE POINT DE VUE DE CORINNE BITAUD – Aujourd'hui, Corinne Bitaud propose d'arrêter de parler d'écologie dans sa chronique, parce qu'elle se demande si on n'en fait pas un peu trop sur ce sujet.
D’année en année, les mauvaises nouvelles climatiques et écologiques sont de plus en plus présentes dans l’actualité. Ouragans, inondations, montée du niveau de la mer, disparition d’espèces… On n’entend plus parler que de ça ! En plus de cela, on nous culpabilise, on nous promet de la sueur et des larmes. Non franchement, ça suffit. Parlons d’autre chose.
Je constate qu’à force d’en entendre parler presque chaque jour, on arrive à un point où la dangerosité de la situation s’estompe dans notre esprit. C’est tout simplement un mécanisme de protection : quand le danger devient quotidien, nous le relativisons pour échapper à l’angoisse qu’il génère. Il faut bien vivre.
Je pense qu'il faut suspendre un instant nos réactions épidermiques, nos ressentis, pour considérer très sérieusement que, sur ce sujet, on parle d’une possibilité tangible de destruction de l’espèce humaine et de très nombreuses autres espèces, par l’effet de l’espèce humaine elle-même. Malheureusement, ce n’est pas un mauvais film de science-fiction. Ce sont des réalités de plus en plus palpables, et leur rythme s’accélère. Beaucoup de spécialistes comparent cette situation à un péril nucléaire à l'échelle planétaire. Le pouvoir de destruction est du même ordre. Les scientifiques disent que nous sommes dans une phase critique : en l’espace de quelques années, nous pouvons choisir de freiner le processus ou bien de le laisser s’emballer. Depuis plusieurs années, on nous avertit même que 2025 sera un seuil d’irréversibilité pour de nombreux phénomènes. Or 2025 arrive à toute vitesse. Alors honnêtement, qu’y a-t-il de plus urgent à discuter aujourd’hui ? Même un effondrement boursier ou un déficit public élevé me semblent être des questions relativement mineures face à un effondrement des écosystèmes qui conditionnent notre existence.
Le mot « crise » vient du grec krisis, qui évoque le pouvoir de discerner. Nous sommes dans un temps où la nécessité de discernement est vraiment unique dans l’histoire de notre espèce. Nous sommes invités à réfléchir à ce qui est vraiment essentiel. Pour nous individuellement, pour les collectifs auxquels nous appartenons, pour nos enfants et les enfants de nos enfants, pour les autres vivants, humains et non-humains, de cette planète. Alors non, après réflexion, je ne crois pas que nous puissions nous taire, puisque nous savons. Un silence, même méthodologique, serait une forme de complicité avec le laisser-faire ; or, refuser de coopérer avec le mal est l’une des formulations possibles de la visée éthique. Finalement, je vais continuer à parler de l’urgence écologique et climatique. À dans 15 jours, donc !
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