Demain 31 janvier, puissant mouvement social dans toute la France : grèves et cortèges de manifestants… Selon le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger, il s’agit "d’appuyer sur l’Assemblée nationale et sur le Sénat", pour les inciter à changer le projet de loi sur les retraites ; et de montrer dans la rue, à Emmanuel Macron et Élisabeth Borne, que l’opinion publique rejette cette réforme.
Mais Laurent Berger ajoute cette précision importante : "À la CFDT, on pense qu’il faut d’abord garder l’opinion avec nous et que le niveau d’efficacité syndicale ne se mesure pas au niveau d’emmerdements concrets pour les citoyens." C’est très bien vu. Pour l’instant, la majorité des Français rejettent le projet de réforme des retraites et approuvent sa contestation unanime par le front des syndicats.
Mais si cette contestation dérapait et rendait infernale la vie quotidienne de millions de personnes, les syndicats perdraient l’appui de l’opinion. Le gouvernement compte là-dessus. Si l’opinion se détournait du mouvement social, le front syndical se disloquerait ; la pression des électeurs sur les parlementaires se relâcherait ; les députés LR pourraient alors oublier leurs scrupules et apporter au bloc des députés macronistes le nombre de voix de droite nécessaire à l’adoption du projet. Madame Borne serait donc libérée du besoin de court-circuiter encore les députés en se servant du 49.3 : méthode de passage en force qui pourrait hypothéquer l’avenir en plongeant des millions de personnes dans l’idée "qu’ils ne sont pas considérés".
Mais même au cas où la réforme était votée, l’avenir risquerait d’être hypothéqué. Une réforme faite contre le sentiment du peuple risque de passer pour une réforme sans le peuple. Voire contre lui. Le ressentiment social entraverait ensuite tout effort collectif pour faire face, par exemple, au changement climatique en réalisant la transition énergétique…
Laurent Berger a raison de le dire : la démocratie ne consiste pas à donner un chèque en blanc au dirigeant qui a remporté une élection. Elle consiste à faire vivre le lien entre les élus et la société civile. C’est cela qui est en question dans la bataille actuelle.
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