Les élections de mis mandat aux États-Unis commencent aujourd’hui. Même si elles ne se tiennent pas chez nous, notre avenir dépend très directement de ses résultats. J’aurais pu vous dire un mot sur l’élection pour la présidence du Rassemblement national, qui s’est tenue ce week-end, ou sur celle pour la présidence des Républicains, qui se jouera les 3 et 4 décembre prochains, mais non. Vous l’aurez compris, l’élection du jour, celle qui me titille, ce sont les "midterms" américaines, qui viennent tout juste de s’achever, de l’autre côté de l’Atlantique, avec la fermeture des derniers bureaux de votes, à Hawaï et en Alaska, ce matin même, à 7 h, heure de Paris. C’est tout frais, mais on n’est pas près de savoir qui, des Républicains ou des Démocrates, va prendre le contrôle du Sénat et de la Chambre des représentants tant le match s’annonce serré.
La Chambre des représentants, l’équivalent de l’Assemblée nationale, compte 435 sièges, tous à renouveler. Leur nombre dépend de la population de chaque État, le Wyoming n’a qu’un représentant par exemple quand la Californie en a 52. Avant l’élection, les Démocrates y avaient une très courte majorité : 220 sièges, contre 212 aux Républicains, plus trois sièges vacants à pourvoir. Côté Sénat, c’est 50-50. Vraiment. 50 aux Républicains, contre 50 aux Démocrates. Contrairement à la Chambre des représentants, tous les sénateurs ne sont pas renouvelés lors de cette élection – seulement un tiers des États sont concernés, et chaque État dispose de deux sénateurs, quelle que soit sa taille.
C’était serré avant le vote et personne n’est capable de prédire clairement ce qui sortira des urnes tant le pays est aujourd’hui divisé. Vu la façon dont la présidentielle américaine s’est déroulée, il y a deux ans, on peut s’attendre à de grosses, grosses tensions autour de ce nouveau scrutin. Les contestations vont se multiplier – des recours ont déjà été déposés dans le Michigan, le Wisconsin et la Pennsylvanie, où Les Républicains, qui restent persuadés que Trump s’est fait voler sa réélection en 2020, veulent faire invalider des votes par correspondance. On peut donc s’attendre à de longues batailles juridiques et à un suspens qui pourrait durer des jours, voire des semaines, avant d’être fixé.
Nous sommes directement concernés pour deux raisons. La première chose, c’est que le pays continue à donner le "la" au reste de la planète en matière de démocratie. Après ce qui s’est passé au Capitole, début 2021, de nouveaux incidents, voire des affrontements physiques entre partisans des deux camps, n’est pas à exclure en cas d’incertitude marquée et prolongée. Tout débordement constituerait un très, très mauvais signal à un moment où de plus en plus de gens doutent de la pertinence de la démocratie dans notre monde en crise.
La deuxième chose, c’est que le système américain n’est pas le système français. Le 49.3 n’existe pas aux États-Unis, et une victoire des Républicains n’obligera pas Joe Biden à nommer Donald Trump premier ministre, une fonction qui n’existe pas chez les Américains. Non. Le résultat serait beaucoup plus simple, et bien pire. En cas de défaite des Démocrates, rideau ! Les États-Unis seront politiquement paralysés jusqu’à la présidentielle suivante. Pas de son, pas de lumière pendant deux ans. Et plus d’aides à l’Ukraine pendant cette période, où la Russie et la Chine auront les mains libres pour avancer leurs pions. L’une comme l’autre sauront en tirer parti. Et le très fragile équilibre du monde pourrait s’en trouver bousculer à jamais…
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