En fin de semaine dernière, un échange de plus de 900 prisonniers a eu lieu au Yémen entre belligérants. Il annonce peut-être le début d’un règlement, au moins partiel, du conflit qui a éclaté il y a huit ans dans ce pays.
Le 9 avril dernier en effet, un responsable saoudien s’était rendu à Sana’a, la capitale du Yémen, pour y rencontrer des responsables houthis de premier plan. Les Houthis sont un mouvement né à la fin des années 90 à l’extrême nord du Yémen. Un mouvement armé issu d’un courant minoritaire du chiisme, le zaydisme, mais surtout un mouvement très anti-américain, très anti-israélien, inspiré par la République islamique d’Iran et le Hezbollah libanais qui d’ailleurs le soutiennent.
C’est parce que les Houthis avaient pris le contrôle de Sana’a à l’automne 2014 que l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis sont entrés en guerre contre eux en mars 2015. Un conflit que les deux pétromonarchies espéraient remporter en quelques semaines, mais qui dure depuis lors.
Progressivement les Houthis se sont emparés de toute la partie nord du pays, soit un tiers du territoire mais où vivent les deux tiers de la population. Ils ont cependant échoué à s’emparer du sud et de l’est du Yémen où un gouvernement internationalement reconnu, mais constitué de factions armées très disparates, a résisté à leur pression militaire grâce au soutien militaire de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis.
Contrairement à leurs espoirs, ces deux pétromonarchies n’ont pas réussi en huit ans à déloger les Houthis de leur bastion du nord. Si les Émirats arabes unis ont officiellement retiré leurs troupes du Yémen en 2019, tout en continuant à soutenir des alliés au sud du pays, l’Arabie saoudite a mis plus de temps à se résigner au fait qu’elle ne pouvait pas venir à bout des Houthis. D’autant que le conflit lui coûter très cher et que le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane, qui est pourtant lui-même à l’origine de cette aventure militaire, a aujourd’hui des projets très onéreux pour moderniser le royaume.
En 2022 déjà, les belligérants au Yémen ont réussi à négocier plusieurs trêves successives entre avril et octobre. Même si ces trêves n’ont pas été renouvelées à l’automne, les Houthis et l’Arabie saoudite ont continué à négocier par l’intermédiaire du sultanat d’Oman, signe que Riyad veut se désengager du Yémen à condition d’obtenir des Houthis qu’ils cessent de bombarder des objectifs sur son territoire et qu’ils garantissent la sécurité de sa frontière sud.
Les Houthis de leur côté voudraient, entre autres exigences, que les ressources pétrolières du Yémen leur permettent de rémunérer les fonctionnaires et les militaires qui se trouvent dans les territoires qu’il contrôle. Mais ces ressources se trouvent à l’est du pays dans la zone du gouvernement internationalement reconnu, basé dans le port d’Aden et soutenu par les pétromonarchies.
Cette question des ressources est au cœur d’un possible accord entre les Houthis et l’Arabie saoudite. Avec cependant un hic considérable : jusqu’à présent, le gouvernement yéménite internationalement reconnu n’est pas pleinement et directement partie aux négociations de paix. Et il n’est pas certain que même sous la pression des pétromonarchies qui le soutiennent, il accepte les termes d’un accord conclu sans lui. Ni d’ailleurs que les Houthis se sentent engagés durablement à son égard. Avec le risque que la guerre continue, même si demain elle se déroule exclusivement entre Yéménites.
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