Le 27 mars dernier, après que des manifestations hostiles se soient déroulées pendant des semaines dans le pays, Benjamin Netanyahou avait annoncé une pause dans l’examen du projet de réforme de la justice présenté par son gouvernement au début de l’année. Mais cette pause se termine. Car dimanche dernier, la session d’été de la Knesset, le Parlement israélien, s’est ouverte.
Comment Benjamin Netanyahou va-t-il se sortir de l’impasse dans laquelle il s’est lui-même engagé ? La session de l'été de la Knesset s'est donc ouverte. Quelques jours plus tôt, une manifestation avait rassemblé environ deux cent mille personnes, favorables au projet cette fois. La pression sur le premier ministre est forte à la fois de la part de certains membres de sa propre formation politique, le Likud, et de la part des partis religieux de différentes obédiences qui forment avec lui la coalition la plus à droite de l’histoire du pays.
Pour les partisans du projet, la réforme de la justice vise à mettre au pas la Cour Suprême du pays dont ils considèrent qu’elle s’est érigée en censeur de la volonté populaire exprimée par les urnes. La difficulté de fond vient ce qu’Israël n’a pas de constitution proprement dite. Au moment de l’indépendance du pays en 1948, le premier ministre de l’époque, Ben Gourion, n’avait pas voulu entrer en conflit avec les chefs religieux qui refusaient que l’édiction d’une norme constitutionnelle puisse aboutir à l’annulation de lois d’inspiration religieuse. Du coup, à défaut de constitution, l’Etat hébreu a adopté au fil du temps une série de Lois dites fondamentales sur la Knesset, sur le chef de l’Etat, sur le gouvernement, sur le pouvoir judiciaire…
Après l’adoption en 1992 de deux de ces lois fondamentales par le Parlement, portant notamment sur les droits de l’Homme, la Cour suprême a estimé que les nouveaux textes fixaient des valeurs constitutives d’Israël, comme « Etat juif et démocratique ». Ils étaient donc de nature constitutionnelle, ce qui permettait à la Cour elle-même de vérifier que les lois ordinaires y étaient conformes, ou pas. Autrement dit, d’exercer un contrôle de constitutionnalité, même en l’absence de Constitution proprement dite. C’est ce pouvoir sur lequel le gouvernement actuel veut revenir. En donnant désormais à la coalition majoritaire au Parlement le pouvoir sur la nomination des magistrats et surtout en permettant à la Knesset d’annuler à la majorité simple une décision de la Cour invalidant une loi ordinaire. Ce à quoi les opposants à la réforme, parmi lesquels d’anciens responsables des forces de sécurité ce qui pèse lourd en Israël, rétorquent que la démocratie n’est pas le droit absolu de la majorité face à la minorité et que la séparation des pouvoirs, incarnée par l’indépendance de la justice, est un principe essentiel des régimes démocratiques.
Depuis la suspension du projet de réforme en mars, une commission entre le gouvernement et l’opposition tente de négocier un texte de compromis pour réformer la justice. Mais les partisans les plus résolus de la réforme estiment qu’il ne faut pas rater l’occasion historique de transformer les institutions israéliennes. La difficulté pour Benyamin Netanyahou, c’est que s’il accepte un compromis, les partis religieux risquent de le lâcher et faire s’effondrer la coalition gouvernementale. Avec la perspective pour le pays de devoir retourner aux urnes pour un énième scrutin à l’issue improbable. Surtout pour le premier ministre dont la cote a dégringolé dans les sondages depuis le lancement de la réforme.
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