Je voulais vous parler ce matin de la Saint-Barthélemy. Et plus précisément de l’inauguration de ce "jardin mémorial" selon les termes utilisés, qui a été inauguré vendredi dernier devant l'église Saint-Germain-l'Auxerrois. Le lieu bien sûr n’a rien d'anodin car c’est le tocsin de cette église qui lança les massacres. À Paris, 3000 protestants furent assassinés et leurs corps mutilés jetés à la Seine. Ils étaient artisans, relieurs ou menuisiers, bourgeois ou nobles… En France, 10.000 personnes périrent ainsi. Pour le 450ème anniversaire de la Saint-Barthélemy, après la plaque inaugurée sur les quais de Seine en 2016, les Parisiens et les touristes pourront donc s’arrêter, face au Louvre, pour lire ce que fut ce pan de notre histoire. Ce geste, la communauté protestante l’attendait depuis longtemps, c’est chose faite...
Mais, au-delà du geste, ce qui fut dit vendredi témoigne de l’importance de la démarche. Car il ne s’agit pas de simplement commémorer le passé… Le moment fort fut sans doute la lecture, par Christian Krieger, président de la Fédération protestante de France, du message envoyé par Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques, pour dire la "tache" que représente ce 24 août dans l’histoire de France et l’horreur de ce qui peut être fait "au nom de Dieu".
Car c’est bien au nom de Dieu et du Roi que fut enclenché le massacre, tout comme aujourd’hui l’instrumentalisation de la foi peut conduire au pire. Ce que tous et toutes ont voulu redire, c’est l’importance de la recherche de la "juste mémoire" qui exige que soit dépassée l’émotion pour que le souvenir du tragique serve le présent, selon les mots du pasteur Krieger.
À les écouter - et vous retrouverez leurs intéressants discours sur le site de RCF -, me revenaient les images d’un reportage au Rwanda, pays où des voisins ont massacré des voisins et où il faut tous les jours apprendre à vivre avec "ça". Car la manipulation peut tout : on en n’est jamais loin quand de prétendues têtes pensantes ou politiques se permettent, en toute impunité, de falsifier l’Histoire… Oui, il nous faut encore et toujours accepter de regarder en face ce qui fut. Comme l’a rappelé la maire de Paris, citant l'historien Patrick Boucheron : "Une mémoire plus complète est certes plus inquiète mais plus juste."
Oui la "juste mémoire" a du bon quand on en réchappe et qu’on en tire le meilleur. Quand on s’appuie sur ce qui ne doit plus être, pour imaginer une société plus solidaire et d’autres façons d’être ensemble. Tel est bien le sens profond du mot religions : ce qui nous relie. Puisse le sens du bien commun œuvrer au cœur et à l’intelligence de nos responsables, qu’ils soient civils ou religieux…
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