Ce matin je voulais parler de notre belle langue française qui devient, malheureusement, un champ de bataille, à cause de l’écriture dite "inclusive" qui la met en péril mortel, selon l’Académie française elle-même.
Hier est sorti un livre coup de poing et coup de cœur "Malaise dans la langue française", que je recommande à tous ceux qui veulent comprendre à quel point ce sujet est tout sauf secondaire. "La langue fait partie de notre bien commun, c’est notre patrimoine le plus essentiel. On ne pense pas en dehors de notre langue. On n’agit pas en dehors de notre langue." Ce livre aux éditions du Cerf est dirigé par Sami Biasoni, on y retrouve avec plaisir Mathieu Bock-Côté, Annie Genevard et pas moins de dix penseurs de tous bords et de premier plan. Et passionnants.
L’écriture dite inclusive est née d’une forme de militantisme idéologique qui part du principe, faux, que notre langue serait sexiste et que l’usage du masculin servirait à invisibiliser volontairement les femmes. Elle consiste donc par exemple à rajouter dans un maximum de mots des "E" saucissonnés avec des points médiants, comme cher·e·s ami·e·s. (Ça fait saigner des yeux et des oreilles, j’en conviens). Elle fait aussi disparaître "Il" et "Elle" et les fusionne en un (soi-disant) pronom neutre et inventé : "IEL". Elle féminise les mots, et même les fonctions allant jusqu’à faire éteindre le feu par des pompières, ou parler des journées du matrimoine.
Cette écriture inclusive confond évidemment le masculin et le masculin-neutre qui sert à inclure. Rappelons aussi qu’en français on distingue le genre des mots du sexe. Ainsi une autruche peut être un mâle, un mouton une femelle, quand une patate, elle, n’a même pas de sexe.
Il n’y a pas besoin de saccager notre langue pour promouvoir l’égalité ou lutter contre les discriminations. Bien au contraire. La liberté, c’est de disposer d’une langue intelligible par tous. L’égalité, c’est que notre langue ne soit pas confisquée et abimée par une minorité au point d’aggraver les inégalités et l’exclusion de ceux qui souffrent de difficultés scolaires, de dyslexie, de dysgraphie ou qui lisent en braille.
Ce livre se conclue avec un texte plein de finesse de Nathalie Heinich qui résiste à la féminisation des noms de métier et se fait appeler CHERCHEUR. "Un droit, dit-elle, authentiquement féministe." Pourquoi considérer que l’usage du masculin masque la féminité, et non qu’il la libère du poids de l’identité sexuée ? Elle écrit : "Mon combat féministe, c’est que ce ne soit pas la femme qu’on juge dans un colloque ou une publication, mais le chercheur. Mon combat féministe, c’est de militer pour la suspension de la différence des sexes dans les contextes où elle n’a rien à faire."
Ce livre, et cette chronique, est dédié à tous les libres penseurs qui se battent pour conserver le droit, pourtant inaliénable en démocratie, de dire le vrai dans la langue qui leur plaît.
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