La nouvelle ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, s’est réjouie la semaine dernière de la baisse des émissions de gaz à effet de serre en France au cours de l'année écoulée : entre juillet 2023 et juin 2024, la France a réduit ses émissions de 4,8 %. Il semblerait donc que nous soyons sur la bonne voie pour sauver le climat ! Cependant, notre éditorialiste du jour n’est pas tout à fait de cet avis.
Depuis cet été, le gouvernement communique sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre en 2023, se félicitant de son action. Alors que l’écologie n’est pas vraiment une priorité politique actuelle, cela permet d’afficher des résultats tangibles. Ces chiffres correspondent à des émissions brutes, c’est-à-dire celles produites par nos différents secteurs comme les transports ou l’industrie. Il faut les distinguer des émissions nettes, qui prennent en compte l'absorption partielle des gaz à effet de serre par les puits de carbone. Par exemple, les forêts captent une partie du CO₂ que nous produisons. Or, en France, les sols et les forêts absorbent aujourd’hui deux fois moins de carbone qu’au début des années 2000. En conséquence, même si nos activités émettent moins de gaz à effet de serre, la réduction effective dans l’atmosphère n’est pas aussi marquée qu’il n’y paraît.
Il est essentiel que cette baisse des émissions se maintienne au même rythme. Si l'on examine les chiffres de plus près, la ministre se réfère à deux données du CITEPA, l’organisme chargé de surveiller les émissions en France : pour l’année 2023 dans son ensemble (de janvier à décembre), les émissions ont baissé de 5,8 % ; cependant, au premier semestre 2024, la baisse n’est que de 3,6 % par rapport au premier semestre 2023. Autrement dit, nous avons été moins performants au début de 2024 qu’en 2023. De plus, nous devons nous préoccuper de l’état de nos puits de carbone : nos forêts, endommagées par les sécheresses et les incendies, ne sont pas en bonne santé et n’absorbent plus suffisamment de carbone. Cela a contribué à ce que, en 2023, nous n’atteignions pas nos objectifs de réduction des émissions nettes, qui sont les plus significatifs à surveiller.
Il est également important de rester modestes face à ces résultats. La baisse des émissions brutes s'explique certes en partie par les politiques nationales et locales, mais elle est aussi due aux efforts des entreprises, des citoyennes et des citoyens, ainsi qu’à un coût élevé de l’énergie, qui a limité la consommation. Le gouvernement devrait plutôt saluer cet effort collectif, en espérant qu’il soit à l’avenir davantage choisi que subi, en favorisant des changements structurels plutôt que conjoncturels. Enfin, il aurait été pertinent d’aborder la question des puits de carbone. C’est l'occasion de rappeler que l’écologie implique aussi de protéger la biodiversité, les forêts et les sols, essentiels pour atténuer le réchauffement climatique.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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