Promis à une grande carrière quand il étudiait à l’ENS rue d’Ulm, François Cassingena-Trévedy a décidé de suivre sa vocation en devenant moine, il y a plus de quarante ans. Face à l’effondrement du paysage religieux en France, le moine et poète du Cantal invite à prendre de l’altitude, à partir pour avoir un nouveau regard. Un mouvement qu’il explique dans son nouvel ouvrage, "Propos d’altitude" paru aux éditions Albin Michel.
La question qui revient souvent chez les enfants, c’est 'pourquoi ?'. Pour François Cassingena-Trévedy, les adultes devraient aussi se la poser. 'C’est vivre en altitude que vivre dans l’interrogation', avance-t-il. Sans pour autant regarder de haut, il semble fondamental que l’on se questionne face à la moindre chose. À l'image du buisson ardent dans les textes, 'Dieu est une question brûlante'. L’une des fonctions de l’homme sur terre est de se questionner sans cesse.
Récemment, la mort de Pierre Soulages a rappelé le lien entre clair et obscur. François Cassingena-Trévedy a un 'attachement mystique pour l’Auvergne'. Il voit en ces terres la parabole visible du clair-obscur. Dans la Bible, aussi, on retrouve cette idée selon laquelle la lumière jaillit de l'obscurité. Et si l'Église traverse une période sombre, la lumière existe ailleurs : 'La seule Église en laquelle je crois, c'est celle de la beauté.' Une beauté simple et lumineuse. Dire honnêtement les choses de la foi, oser nous dire nos doutes et nos questions, et accepter que Dieu puisse nous échapper sont des actions permises grâce au questionnement.
Pour mieux vivre l’expérience humaine, pour mieux supporter sa 'souffrance inexplicable', l’intervenant invite à observer la beauté de notre existence. À faire de notre souffrance un matériau sans ignorer que le bonheur est éphémère. 'C’est à l’écart de la religion qu’il faut chercher le recueillement'. C’est le souhait d’avancer seul qui a poussé François Cassingena-Trévedy, il y a deux ans, à aller vivre seul. Estimant que 'la religion fait encore trop de bruit, j'ai voulu prendre la fuite quand le visage institutionnel s'est effondré', explique l'auteur.
'J’ai le sentiment de n’avoir jamais été aussi pauvre que depuis que j’ai ma maison !' Propriétaire depuis deux ans et après 40 ans de vie monastique, François Cassingena-Trévedy est confronté aux tracas du quotidien. Malgré sa maison ou sa carte bleue, il continue d’aspirer à la frugalité, aspirant à 'une vie simple et sans besoins extraordinaires'.
L’obéissance, deuxième vœu prononcé à l’entrée du monastère, est un 'consentement sans révolte'. Mais 'tout est à revoir', puisque c'est cette obéissance a été le terreau d’abus et de manipulations. Conscient de l’immense travail à mener, François Cassingena-Trévedy rappelle 'qu'un homme reste un homme”. Pour lui, le mensonge de l’institution est de vouloir faire croire que l’on peut être sain. 'Le problème c’est qu’on vit dans le magique : même la sainteté n’est pas parfaite.'
Le moine questionne aussi ce vœu de chasteté. Le christianisme prône l’amour et l’incarnation, et la chasteté est un poids lourd à porter. 'Je suis pour qu’on puisse ordonner des personnes mariées', affirme-t-il. En nuançant ensuite : 'mais ce n’est pas la vocation monastique première...'
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