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[Archive] L'abbé Pierre, le cœur d'un homme libre

RCF, le 1 février 2024 - Modifié le 22 juillet 2024
Grand TémoinAbbé Pierre, le cœur d'un homme libre

En 1997, Thierry Lyonnet, grand reporter à RCF, recevait l'abbé Pierre pour une longue interview sur le parcours extraordinaire de cet homme ordinaire. Redécouvrez la voix de "l'appel du 1er février 1954", alors que nous fêtons aujourd'hui le 70ème anniversaire de cet appel au secours. Un témoignage qui résonne avec l'actualité alors qu'on sait que le nombre de sans-abris a doublé en dix ans selon la Fondation Abbé Pierre.

Conférence de l'abbé Pierre à Bologne (Italie) [dans le cadre des camps de jeunes], 24 mars 1969. ©Emmaüs internationalConférence de l'abbé Pierre à Bologne (Italie) [dans le cadre des camps de jeunes], 24 mars 1969. ©Emmaüs international

[Mercredi 17 juillet 2024, l'Abbé Pierre est accusé, dans un rapport, d'agressions sexuelles par plusieurs femmes. Les faits auraient été commis entre la fin des années 1970 et 2005, ont annoncé le 17 juillet 2024 Emmaüs International, Emmaüs France et la Fondation Abbé Pierre.]

L'abbé Pierre, une voix qui dérange

"Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à 3 heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol..." Après l'hiver 54, l'année de son appel à la radio resté célèbre, l'abbé Pierre n'a cessé de déranger : l'inertie des politiques, nos égoïsmes, l'Église, parfois, avec son franc-parler. A 86 ans, il vivait dans la simplicité mais était l'homme le plus populaire de France. Il recevait Thierry Lyonnet dans sa modeste chambre-bureau d'Alfortville.

 

Redécouvrez le podcast "Les colères de l'Abbé Pierre"

 

La désillusion enthousiaste

"Tout n'est que désillusion. Nous sommes nés dans l'illusoire et nous annonçons par l'élimination des illusions." Ainsi l'abbé Pierre expliquait-il ainsi ce qui a été "la doctrine de toute [sa] vie": se débarrasser de ses illusions pour devenir "enthousiaste", c'est-à-dire étymologiquement "en Dieu". "Devenir un avec Dieu, l'éternel amour, parce qu'il y a eu d'abord le décrassage pénible de l'illusoire."

Georges, le premier compagnon d'Emmaüs

Un jour, c'était en 1949, l'abbé Pierre rencontre Georges. Un homme désespéré, qui a déjà essayé d'en finir. "Tout commence là, parce que j'écoute." Le prêtre qui est alors député (MRP) de Meurthe-et-Moselle, lui dit qu'il ne peut rien pour lui. L'argent qu'il gagne, il le place dans la construction de logements pour des pauvres. "Je dis à ce Georges: Moi je ne peux rien pour toi parce que je n'ai que des dettes, mais toi tu veux te tuer, donc il n'y a rien qui t'embarasse, avant de te tuer tu voudrais pas me donner un coup de main?" Et parce que Georges a dit oui, ainsi sont nés les Compagnons d'Emmaüs. "A partir du oui de Georges et de l'idée folle, Toi, donne."

 

L'appel de l'abbé Pierre, le 1er février 1954
"Mes amis, au secours...
Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à 3 heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l'avait expulsée. Chaque nuit, ils sont plus de 2000 recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d'un presque nu. Devant l'horreur, les cités d'urgence, ce n'est même plus assez urgent!
Écoutez-moi ! En trois heures, deux premiers centres de dépannage viennent de se créer : l'un sous la tente au pied du Panthéon, rue de la Montagne Sainte Geneviève; l'autre à Courbevoie. Ils regorgent déjà, il faut en ouvrir partout. Il faut que ce soir-même, dans toutes les villes de France, dans chaque quartier de Paris, des pancartes s'accrochent sous une lumière dans la nuit, à la porte de lieux où il y ait couvertures, paille, soupe, et où l'on lise sous ce titre « centre fraternel de dépannage », ces simples mots : « Toi qui souffres, qui que tu sois, entre, dors, mange, reprends espoir, ici on t'aime ».
La météo annonce un mois de gelées terribles. Tant que dure l'hiver, que ces centres subsistent, devant leurs frères mourant de misère, une seule opinion doit exister entre hommes : la volonté de rendre impossible que cela dure. Je vous prie, aimons-nous assez tout de suite pour faire cela. Que tant de douleur nous ait rendu cette chose merveilleuse : l'âme commune de la France. Merci! Chacun de nous peut venir en aide aux sans abri. Il nous faut pour ce soir, et au plus tard pour demain: 5.000 couvertures, 300 grandes tentes américaines, 200 poêles catalytiques.
Déposez-les vite à l'hôtel Rochester, 92, rue de la Boétie ! Rendez-vous des volontaires et des camions pour le ramassage, ce soir à 23 heures, devant la tente de la montagne Sainte Geneviève.
Grâce à vous, aucun homme, aucun gosse ne couchera ce soir sur l'asphalte ou sur les quais de Paris
."

 

La bande annonce du podcast "Les colères de l'abbé Pierre"

Émission Grand Témoin © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Grand Témoin
Émission Grand Témoin © RCF
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